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Le grand quizz de la BNG
Découvrez la banque de données policières la plus gargantuesque du pays en quelques questions-quizz
Vous n’avez rien à cacher ? La Banque Nationale Générale (BNG) si. Vous vous en fichez ? Ça tombe bien, la BNG aussi. Et avec tout ça, on ne vous a encore rien dit. Découvrez ce qui se cache dans les fiches de la plus grande banque de données policières du pays. On parie que vous tiquerez aussi ?
La BNG c’est une vaste banque rassemblant les données de tous les corps de police, les fédéraux comme les locaux. Elle ne contient pas les informations en soi. C’est plutôt une référothèque, un lieu permettant de voir où se trouvent d’autres documents, et permettant d’avoir une vision succincte des personnes et des faits, avec la référence des documents à consulter si nécessaire.
Des accès différents sont paramétrés. La BNG n’est pas accessible dans son ensemble à tout le monde : seuls les enquêteurs ont accès à toutes ses ressources.
Classe ultime, l’un d’eux utilise même les données récoltées dans un procès en divorce.
Un autre truc chiffonne le Comité P. Un enquêteur qui consulte la BNG doit motiver sa démarche. Mais même s’il ne le fait pas, le programme donne accès à la fiche demandée. La justification de la consultation n’est pas un champ obligatoire pour accéder à la BNG. Le Comité P signale ce problème plusieurs années de suite. Sans réaction… Mais soit. Les données rentrent, s’amassent comme le souhaitait le législateur.
La BNG est une base de données de faits. Pour encoder une personne, il faut la lier à un fait. L’inverse n’est pas vrai. Mais depuis janvier 2005, un nouveau venu débarque en effet dans la BNG : « les informations douces » (ou les faits non concrets). Ces infos douces passent par les RIR (mais ne sont pas forcément drôles).
Les RIR, ce sont des fiches d’informations qui rassemblent des faits qui n’en sont pas. Cela peut être une dénonciation, une rumeur, un contrôle de police, un comportement suspect. Cela signifie que toutes les personnes qui sont encodées dans la BNG sont considérées comme « suspecte », liée à un délit avéré ou non.
Mais la BNG contient aussi des objets, des lieux Et des organisations.
Vous savez combien d’organisations sont à présent encodées dans la BNG ? Plus de 70 000 !
En 2009, un projet d’arrêté royal concocté par les anciens ministres de l’Intérieur, Patrick Dewael (Open VLD), et de la Justice, Jo Vandeurzen (CD&V), prévoyait d’ajouter des informations très privées : orientation sexuelle, religion, descriptions physiques et psychiques, habitudes de consommation… Face à la médiatisation de ce projet, celui-ci fut retiré.
Heureusement que cette BNG est sous le contrôle du Parlement. Enfin du Sénat. Enfin plus ou moins… Un « règlement » pour utiliser la BNG était prévu, mais il aura fallu un peu de temps pour régler les derniers détails…
La loi de 2014 est une belle avancée. Elle instaure une règle générale : une donnée est archivée ou effacée lorsqu’elle présente un caractère non adéquat, non pertinent ou excessif.
Retrouvez toutes les informations dévoilées dans le premier volet de l’enquête consacrée à l’hypersurveillance policière en (re)lisant l’épisode 1 de la BNG, la Base Non Gérée, ici
L’encodage reste malgré tout un acte humain, et les tendances n’échappent pas aux soubresauts de notre époque.
En 2017, un événement étonnant sera passé au crible de la BNG. 50 000 personnes. C’était du côté de la Côte.
Le but de ce screening massif était de contrôler si les festivaliers étaient connus de la police pour certains faits commis dans une période déterminée. C’est au final 29 186 identités de visiteurs (et 21 433 identités de collaborateurs) qui ont été analysées ! 10 % étaient connues de la BNG, soit 2 077 visiteurs et 1 912 collaborateurs.
Si on comptait 31 000 enquêtes encodées fin 2006, il y en avait 270 000 en 2019, soit neuf fois plus d’enquêtes encodées. De quoi inventer le néologisme « factobésité » ! Et encore, c’était en 2019. Depuis lors, le coronavirus et sa cohorte de PV sanitaires sont venus s’ajouter au mégalodon.
Trois millions ! Le nombre de personnes présentes dans la BNG a doublé en 15 ans. Les faits ont triplé pour atteindre le chiffre démentiel de 25 millions de faits concrets. Plus de deux par habitant.
Au-dessus de 14 ans, vous subissez le même traitement que les adultes. En dessous de 14 ans, il faut l’accord du Juge de la Jeunesse pour vous joindre à cette grande fête de la data. Mais personne ne peut nous expliquer le protocole à suivre pour valider l’encodage d’un mineur.
Et pourtant, tout le monde n’est pas encodé dans cette mégabase. Pourquoi ? Parce que des zones de police développent leur propre base de données « perso ». Tranquille, au chaud, dans leur commissariat.
Ces bases particulières se chiffrent en centaines, voire en milliers. Bandes urbaines, hooligans, sanction administrative, voleurs de chevaux, graffeurs sauvages, tout est bon tant qu’on puisse justifier des circonstances spécifiques et des besoins particuliers.
S’il existait auparavant un registre public de ces fichiers particuliers, ce n’est plus le cas. Les banques de données « particulières » ne doivent plus être notifiées à l’Autorité de contrôle, et ce depuis 2019 et une loi modifiant diverses dispositions en ce qui concerne la gestion de l’information policière. C’est dommage…
Retrouvez toutes les informations dévoilées dans le second volet de l’enquête consacrée à l’hypersurveillance policière en (re)lisant l’épisode 2 de la BNG, la Base Non Gérée, ici
Lors des auditions pour confectionner la loi de 2014, quand la BNG ne pesait alors « que » 1,7 millions de personnes enregistrées, les mineurs de 14 à 18 ans représentaient environ 15 % du nombre de personnes identifiées. Les moins de quatorze ans, 1,6 %.
Y aurait-il des erreurs d’encodage dans la BNG ?
52 % ! Conclure que la moitié des infos dans la BNG est fausse, ce serait un raccourci excessif. Les personnes qui ont demandé une vérification suspectaient peut-être que leur dossier contenait des erreurs. Cependant, la conclusion du COC ne laissait pas beaucoup de doutes : « (…) la BNG contient encore de nombreuses inexactitudes et/ou erreurs. »
Heureusement, un archivage et une ventilation permettent de supprimer au fur et à mesure les données contenues dans la BNG. Après trois ans, un « contact manifestations » s’archive. Un an pour une contravention, 10 ans pour un délit, 30 pour un crime. Ces délais sont des durées maximales. Si l’information n’est plus jugée pertinente et utile, la police doit la ventiler (la ré-aiguiller, quoi. Soit l’archiver, soit la supprimer).
Le 7 avril 2016, une réforme de la BNG devait être réalisée. Elle contenait un archivage et effaçage automatique des données. Mais faute de moyens, le législateur a reporté d’un an les modifications prévues.
Sans archivage, on commence à être vraiment serrés dans la BNG. Surtout avec la croissance exponentielle de PV liés au coronavirus. C’est d’autant plus énorme que début mars 2021, le gouvernement a envisagé une mesure toute particulière pour les personnes de retour de voyage à l’étranger.
Donc si vous ne faites pas le test ou ne respectez pas la quarantaine, vous serez fichés.
Pour mieux comprendre ce croisement de données entre la police et l’Etat, (re)lisez l’épisode 3 de notre série consacrée à la BNG accessible en cliquant ici
Mais mais… si ça tombe, vous êtes dans la BNG ! Vite, vérifions ! Ah mais ce n’est pas si facile que cela.
Si vous demandez par mail (la procédure est très simple) au COC vos données de la BNG, voici ce que vous recevez : « À l’issue de son contrôle, le COC vous informe qu’elle a effectué les vérifications nécessaires ». Donc on vérifie pour vous et faites-nous confiance.
Découvrez comment la vie de Johan, Ahmed, Karim et Sophie a basculé lorsqu’ils et elle ont appris l’existence d’une fiche avec leur nom dans la BNG en (re)lisant le 4e volet de notre série BNG, Mais où est Johan ?
Fort de ce constat, Médor est allé voir Frank Schuermans, la figure centrale de l’Organe de Contrôle des données policières (COC), car l’info-flic, c’est son domaine. Son équipe et lui veillent à la légalité de la gestion des bases de données par nos polices.
Découvrez l’interview de Frank Schuermans, porte-parole et membre-conseiller de l’Organe de contrôle (COC), L’absence d’archivage de la BNG ? "Un problème majeur", en cliquant ici
Et comme Médor ne fait rien à moitié, nous sommes partis à la rencontre du secrétaire d’Etat à la Protection de la vie privée, Mathieu Michel. Il a insisté sur la transparence et l’accessibilité des données. Alors forcément, on a parlé BNG et fichage des voyageurs… Et on a flippé. Son interview est à découvrir en cliquant ici.
L’interview du Secrétaire d’Etat à la Protection de la vie privée est à découvrir en cliquant ici.