« Longue vie aux pangolins ! »
Comment renoncer à l’ennui quand on se sait condamné ? Survivant d’une tumeur maligne au cerveau, l’écrivain et philosophe Patrick Declerck dézingue l’incorrigible Homo sapiens, « un destructeur ».
Un propos noir et cinglant comme l’arme du sniper professionnel qu’il est devenu. Décalé et drôle, aussi.
Il y a bientôt quinze ans, Patrick Declerck apprend par son médecin qu’il souffre d’une tumeur au cerveau. Agressive, mal positionnée. « Il m’a dit de régler mes affaires. J’ai réagi en allant m’acheter un fusil de chasse de marque Browning pour me tirer une balle dans la tête au cas où… » Sa hantise ? Assister sans mots à sa déglingue : ne plus pouvoir parler, écrire, surtout, penser le monde, caresser son chien, les seules choses qui comptent vraiment à ses yeux. En mars 2013, Patrick Declerck, également anthropologue, philosophe et psychanalyste, s’est donné un peu de rabiot en se laissant dévisser la boîte crânienne, comme il le raconte crûment dans Crâne. L’écrivain est resté éveillé et conscient pendant toute l’opération, guidant les chirurgiens pour extirper la tumeur sans abîmer le langage. Patrick Declerck a gardé la parole. Il avoue en être sorti chamboulé, à la fois libéré, confronté à sa limite ultime et conforté dans ses désillusions. « Il y avait un peu plus de 3 % de risque que cela finisse mal. Ce qui d’ailleurs n’est pas sans évoquer les statistiques du coronavirus. »
3 %, c’est peu ? C’est beaucoup ? On ne sait combien de morts fera l’épidémie actuelle, mais l’écrivain rappelle, avec un bon sourire, que, « quels que soient le scénario et les causes précises, le taux de mortalité finit toujours par rester stable, soit 100 % pour l’ensemble des vivants. Nous sommes plus de 8 milliards sur terre, c’est grotesque. L’invasion, c’est nous. La vraie épidémie du monde, c’est nous. Et …