"Vous entendez ce petit coeur ?"

J’ai 25 ans et n’ai jamais eu de règles très fortes, les dernières sont là mais vraiment infimes.Mon copain vient de me larguer il y a a peu près un mois, je ne le vis pas bien, je ne me sens pas bien, je le mets sur le compte du cœur brisé. Quelque chose cloche cependant. Je suis patraque, j’ai l’impression que ma gueule de bois est perpétuelle. Je fais un test. La languette marque 2 barres alors que je suis encore entrain d’uriner dessus. C’est la cata. Moi qui rêve d’être maman, ce n’est certainement pas dans ces conditions. Mon gynécologue est en congé, je prends rdv chez le premier disponible. Un vieux. J’arrive dans son cabinet, je lui explique que je ne crois pas que cela soit une bonne nouvelle et que les conditions ne sont pas bonnes pour que je garde ce fœtus. C’est le mot que j’emploie. C’est important. Il m’ausculte, avec l’écran et le son. Un petit cœur bat, il me montre les esquisses de bras, de jambes, je suis à 9semaines. Il me regarde et, toujours jambe écartées et ouverte devant lui, il pose son menton sur mon genou et me dit : "vous entendez ce petit cœur ? J’adore mon métier." Et m’offre son plus beau sourire. J’ai cru mourir de rage. La dualité de mon ressenti, la raison qui me disait de ne pas faire cet enfant seule et ma certitude que je serais une mère compétente si je faisais le choix de le garder me tranchait en deux. Je n’y ai plus jamais mis les pieds, j’ai appelé mon psy, il m’a pris le lendemain. J’ai ensuite pris contact avec un planning familial et tout s’est bien passé. Jusqu’au bout, j’ai bien dit que c’était un choix de raison. Pas un choix viscéral. J’ai avorté. Il y a 10 ans. Je n’oublierai jamais. Ma cousine a une fille qui est née à la date annoncée. J’ai désormais deux enfants avec un homme qui m’aime, ils ont un papa et une maman réunis. Jamais je ne regretterai mon choix.

Mon avortement, si violent

Si vous avez été victime de violence(s) lors de votre IVG, à travers des mots ou des actes du personnel soignant, n’hésitez pas à livrer votre témoignage. La parole libérée contribue à ce que de tels agissements ne se reproduisent plus.

Ce mur de témoignages fait écho à notre article "Un avortement, deux claques", paru dans le numéro 23, en juin 2021.

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