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L’auditorat du travail de Bruxelles enquête contre un hôpital

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Marin Driguez. CC BY-NC-ND.

Suspecté de ne pas respecter les horaires des médecins spécialistes en formation, un hôpital bruxellois a reçu deux visites non-annoncées du Contrôle des lois sociales, sur instruction de l’auditorat du travail de Bruxelles. S’en est suivi un avertissement : l’institution hospitalière est tenue de mettre fin aux débordements d’horaires. D’autres contrôles devraient suivre dans d’autres hôpitaux de Bruxelles.

22 octobre 2019. Une équipe du Contrôle des lois sociales débarque dans un hôpital bruxellois pour une visite non-annoncée. Motif : venir recueillir des documents dans le cadre de l’ouverture d’une enquête sur le dépassement des horaires des Médecins Assistants Cliniciens Candidats Spécialistes (MACCS). Quatre mois plus tard, le même hôpital reçoit une nouvelle visite des inspecteurs.

Suite à ces deux visites, et à la lecture des relevés d’horaires obtenus par le Contrôle des lois sociales, l’auditorat du travail de Bruxelles a estimé que «  les horaires légaux étaient clairement dépassés  » dans cet hôpital.

Un avertissement est alors envoyé, le 13 juillet 2020, à la direction de l’hôpital en question. Cet avertissement stipule que l’institution hospitalière doit régulariser sa situation et mettre en place un outil de contrôle des horaires des MACCS, pour respecter la loi de 2010 sur le temps de travail.

Concrètement, combien d’heures de travail par semaine cela représente-t-il ?

D’après les conventions de stage signées par les MACCS et par les hôpitaux, le temps de travail réglementaire des MACCS (ou temps de formation) est de 38 à 48 heures de moyenne par semaine, avec d’éventuels pics hebdomadaires à 60 heures. Si les MACCS acceptent de signer la clause qui accompagne généralement leurs conventions de stage (le fameux opting out), le temps de travail peut alors s’allonger en toute légalité, pour atteindre 60 heures de moyenne maximum par semaine, avec d’éventuels pics hebdomadaires à 72 heures. Mais pas au-delà.

Or, dans le cas de l’hôpital bruxellois qui se trouve dans le collimateur de la justice, «  nous avons constaté que certains assistants travaillent parfois 90 heures par semaine, soit 18 heures de plus que l’opting out  », indique-t-on place Poelaert, à l’auditorat du travail.

Une culture du débordement d’horaire

Le dépassement des horaires légaux fait partie du quotidien des MACCS. De nombreuses cliniques belges francophones entretiennent cette « culture généralisée du débordement d’horaires », comme nous l’indiquions dans notre enquête publiée en novembre dernier (« De l’impossibilité de travailler moins de 60 heures par semaine »). Mais cette enquête ouverte par l’auditorat du travail de Bruxelles est, à notre connaissance, une première.

L’hôpital bruxellois concerné par l’enquête de l’auditorat du travail de Bruxelles fait partie des institutions qui forment et emploient chaque année un grand nombre d’assistant.es. L’intégration des MACCS aux équipes de cet hôpital fait partie intégrante de son fonctionnement – au point que certain.es MACCS parlent d’une « dépendance » de certains services à leur présence.

Contacté par nos soins, l’hôpital concerné par l’enquête judiciaire nous a confirmé que l’inspection du travail les avait sensibilisés à la problématique du temps de travail des assistant.es en juillet dernier. «  Un outil de gestion du temps de travail des assistants est d’ailleurs en cours de réflexion afin de répondre le mieux possible à cette problématique. Nous essayons de fournir les meilleures conditions de formation et de travail possibles pour les MACCS, et ce dans le respect du cadre légal (loi de 2010).  »

De futurs contrôles à venir à Bruxelles

Selon nos informations, une première réunion s’est tenue à ce propos mi-janvier, entre la direction médicale de l’hôpital, des représentant.es de l’université partenaire et un groupement d’assistant.es. Le recours à un outil informatique pour encoder de façon réglementaire les heures de travail réellement prestées – plutôt qu’un tableur Excel susceptible d’être modifié en cours de route – serait la solution envisagée. Cet outil informatique devrait, nous dit-on, voir le jour pour la mi-juin.

Tant que l’outil en question n’est pas entré en application, l’auditorat du travail de Bruxelles reste prudent : «  De quel outil informatique parle-t-on ? Et quelles en seront les modalités de mise en œuvre ?  » Pour s’assurer du recours à un outil efficace, il nous que revient que d’autres contrôles devraient avoir lieu dans cet hôpital, dans les plus brefs délais.

A l’heure actuelle, un seul hôpital bruxellois figure dans le dossier de l’auditorat du travail de Bruxelles. Sans la crise sanitaire qui a sérieusement chamboulé l’année 2020, d’autres hôpitaux auraient également reçu des visites non-annoncées du Contrôle des lois sociales (SPF Emploi).

C’était – et cela reste – l’intention de l’auditorat du travail de Bruxelles : «  Le but est de contrôler toutes les institutions qui entrent dans le champ d’action de l’auditorat du travail de Bruxelles. Nous comptons poursuivre notre travail d’enquête sans désemparer. Nous avons réfléchi à des modalités de contrôles qui prennent en compte les impératifs liés à la crise sanitaire. »

L’auditorat du travail de Bruxelles est compétent pour les hôpitaux bruxellois uniquement. D’éventuels contrôles dans les hôpitaux wallons dépendent de la prise d’initiative des auditorats wallons.

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