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Papier carbone

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Emmanuel Kervyn. CC BY-NC-ND.

Quand on a une ambition écolo, utiliser du papier recyclé, c’est la moindre des choses. Pourtant, il se révèle plus rare, plus cher et, surtout, il provient de plus loin.

Entre du papier recyclé (contenant un minimum de 50 % de fibres issues de la récupération post-consommation) qui vient de loin et du non-recyclé produit près de chez nous, quel choix serait le plus respectueux de l’environnement ? La question agite les organisations soucieuses de véhiculer une image écoresponsable de leur publication. Forcément, la réponse n’est pas simple.

L’association de protection de la nature Natagora a posé son choix : « Nous utilisons du papier non recyclé mais produit en Belgique, chez Burgo Ardennes », confie Christophe Collas, responsable publications. « Le recyclé provenait d’Italie… » Une préoccupation que l’on retrouve également chez Écolo. « Nous cherchons toujours à imprimer sur du papier recyclé, mais c’est tellement difficile à trouver », se plaint un conseiller vert. Les raisons ? La difficulté d’approvisionnement en Belgique et le surcoût. Une réalité que nous connaissons aussi, chez Médor. Le papier que vous tenez entre les mains n’est pas du papier recyclé, malgré notre volonté d’agir en parfaits écoresponsables.

« La demande initiale pour du papier recyclé est relativement importante », nous explique Leila Fourati, responsable de l’imprimerie Bietlot à Charleroi. Mais en découvrant le prix, le client revoit souvent sa demande. « Les gens s’imaginent que c’est moins cher que du papier normal. Or cela coûte 15 % de plus pour du Cyclus (papier le plus répandu). Pour d’autres, on peut aller jusqu’au double du prix. » Outre cette différence de prix, les imprimeurs que nous avons contactés parlent d’une pénurie de papier recyclé. En cause, la fermeture d’Arjowiggings, le plus grand papetier français, qui était le principal fournisseur des imprimeurs belges pour le papier recyclé. En Belgique, les trois plus grands distributeurs de papiers (Antalis, Igepa et Papyrus) ont dû trouver de nouveaux fournisseurs, en Autriche, en France ou en Italie, car aucun papier recyclé n’est produit chez nous. Le transport à travers l’Europe s’opère par camions.

La Fédération belge de fabricants de pâtes, papiers et cartons (anciennement Cobelpa) nous assure que cette situation ne concerne que le papier d’usage courant (flyers, prospectus et papier domestique), et non le papier journal. Ce dernier est bien produit en Belgique, chez Stora Enso à Langerbrugge au nord de Gand. Les chiffres Indufed montrent un taux de fibres recyclées qui s’élève à 94 %.

De l’ardennais labellisé

Si l’on veut du papier classique local mais non recyclé produit en Belgique, il faut se tourner vers l’usine Burgo Ardennes à Virton (filiale du groupe italien Burgo) ou vers l’usine Sappi, située à Lanaken. Les deux usines répondent par ailleurs à de nombreux labels écoresponsables, dont les deux certifications les plus connues : PEFC (Programme for the Endorsement of Forest Certification) et le FSC (Forest Stewardship Council). Ces labels assurent une gestion responsable des ressources forestières. Sur le continent européen et ses 175 millions de kilomètres carrés de forêts, 45 % sont certifiés PEFC, 22 % FSC. L’usine Burgo Ardennes, elle, pose toutefois question, notamment pour les odeurs qu’elle dégage dans la région.

Malgré le transport, le recyclé resterait le choix le plus écologique, selon l’enquête de Nouvelles Graphiques. « Le papier recyclé reste le choix le plus durable, car il ne requiert pas d’abattre des arbres et incite à une utilisation circulaire des ressources », indique Béatrice Wedeux, du WWF. La production de papier recyclé, par rapport à celle d’un papier de fibres vierges, nécessite jusqu’à 2,5 fois moins d’énergie et d’eau et émet jusqu’à 38 % de CO2 en moins. Toutefois, le processus de recyclage deman­de un blanchiment du papier à base de produit chimique oxydant. D’après la CEPI, 93 % de l’eau utilisée est retournée dans de bonnes conditions.

« Je me suis souvent demandé ce qui était le plus écologique, sans avoir trouvé la réponse », reconnaissait le responsable de Natagora. L’information est difficilement accessible, les calculs sont complexes. Le choix du Belge s’articule entre du recyclé ou du local, faute de pouvoir concilier les deux.

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