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Que mangez-vous ?

Tous les deux ans, l’office belge de statistique Statbel mène une enquête sur les dépenses des ménages belges. Médor s’est penché sur ces données avec une question : qui mange quoi ?

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Quentin Dufour. CC BY-NC-ND

1. L’alimentation, toujours plus chère ?

Dans son numéro de juin 2024, Médor a abordé à deux reprises la question de notre alimentation. L’article « La bataille de Tervueren » raconte la résistance d’habitants d’une commune aisée face à l’installation d’un McDo près d’une école. « Delhaize 2024 » évoque les conséquences de la franchisation pour le personnel des magasins dans la grande distribution.

Comment les Belges organisent-ils leur alimentation ? Quelle proportion de leurs revenus y consacrent-ils ? Et pour quels produits ? Visite dans le panier des Belges.

Premier constat : les Belges consacrent proportionnellement de moins en moins d’argent à leur alimentation. Au profit des télécoms (vive l’arrivée des GSM), des loisirs (vive les citytrips), de l’habillement (vive la fastfashion) ? Pas vraiment. C’est le loyer et l’électricité qui plombent nos budgets…

Regardez donc l’évolution du budget des ménages, entre 1979 et 2022 :

2. On dépense moins en nourriture. Mais quelle nourriture ?

En 20 ans, la viande est passée d’un quart du budget alimentaire des ménages à un cinquième (8 % en moins). Cette courbe est à mettre en lien avec l’augmentation progressive du budget fruits et légumes (+ 5,32 % depuis 1999). Jusqu’en 2022, où les ménages belges dépensent autant en viande qu’en fruits et légumes.

La consommation de pain et de céréales est le troisième pilier du budget alimentaire, passé de la deuxième place en 1999 à la troisième de nos jours (les légumes doublant le pain).

3- Le panier a-t-il évolué ?

La tendance principale est à la diversification des produits au sein de chaque catégorie, à l’exception de la viande.

Viande : Tous les produits à base de viande baissent fortement sauf la volaille, dont la consommation est en augmentation.

Fruits : Avec le temps, on consomme un peu moins d’agrumes, de pommes, de bananes, mais la vente des fruits exotiques a augmenté, de même que celle des fruits rouges et des fruits secs.

Légumes : La tomate est le légume (qui est en fait un fruit) le plus consommé par les Belges. Soulignons l’apparition des substituts à la viande (tofu, seitan, etc), et le succès de la vente de mélange de légumes prédécoupés.

Pains et céréales : forte augmentation du riz et des plats à base de riz.

Poisson : la consommation de saumon frais a doublé en 23 ans !

(vous ne voyez pas vos aliments préférés ? Sélectionnez la ou les catégories d’aliments et visualisez la remontée du saumon !)

4- Que mangent les Belges à l’extérieur ?

Après le confinement, les restaurants ont retrouvé leur public en 2021. Mais à quel niveau ? Qui sort ? Quel est l’impact de l’essor des livraisons ?

Un constat domine : la part des fastfood diminue et celle de la livraison augmente. La livraison ne grignote pas, à ce stade, sur les dépenses au restaurant.

5 - La malbouffe, une affaire de « pauvres » ?

Viandes et légumes : proportion identique, quelle que soit la richesse du ménage.

Constat étonnant : riches et pauvres consacrent la même part de leur budget alimentaire à la consommation de viandes, de légumes, ou de chocolat. Et l’évolution est la même sur 20 ans.

Regardez la répartition du budget alimentaire par groupes de revenus et son évolution :

Peut-on en déduire que l’assiette est (dés)équilibrée de la même manière ? Difficile à affirmer sur cette seule base de données. Mais en observant dans le détail des sous-catégories comme « Brochettes, satés, gyros… (surgelés) », « Hamburgers et autres sortes de “burgers” (surgelés) », « Snacks à frire », « Légumes surgelés », « Pommes de terre et préparations à base de pommes de terre, frites ou chips », on ne constate pas de grandes différences selon les revenus des ménages.

Quoique…

Côté pommes de terre, la reine de nos assiettes, on constate que ce sont les ménages les plus aisés qui consacrent la plus grande part de leur budget aux chips ! Aliment réinventé et de plus en plus haut de gamme ?

Si la diversité d’alimentation, la priorisation des légumes, est une question d’éducation, elle serait à poser tant chez les riches que chez les pauvres !

En ce qui concerne le frais et le bio : pas de disparité de dépenses entre les ménages à faibles ou gros revenus. Ils consacrent la même proportion de leur budget aux produits frais et bio. Les personnes à bas revenu auraient la même "attention" envers les produits bio, à défaut d’avoir le même pouvoir d’achat…

Mais la différence de budget est grande !

Le budget moyen annuel des ménages les moins riches est de 3000 € par an tandis que le budget moyen annuel des ménages avec le plus de revenus est supérieur à 7000 € / an. Les ménages les plus riches ont un budget alimentaire 2,5 fois plus important que les ménages les plus pauvres. Cette différence se marque dans toutes les catégories de produits. Les ménages les plus riches dépensent près de deux fois plus en viande, pains, fruits et légumes, etc. que les plus pauvres.

On pourrait estimer que les personnes aisées ne mangeant pas trois fois plus, elles mettent le prix dans du frais et bio haut de gamme, là où les personnes défavorisées vont privilégier les premiers prix. Ceci pourrait expliquer le succès du poulet, viande peu chère. L’hypothèse qui se dégage, impossible à vérifier dans le cadre de ce travail, est que l’enjeu de l’alimentation saine ne porte pas tant sur les catégories d’aliments mais sur l’accès à une nourriture de qualité.

Les ménages les plus riches ont un budget « restaurants » (le « s » compte ici…) trois fois plus important que les ménages les plus pauvres.

Par ailleurs, on constate par produit une grande consommation des boîtes repas chez les ménages aisés. Achète-t-on uniquement de l’alimentation, ou également du temps (de travail, de loisirs) que l’on s’épargne en cuisine ?

Avec le soutien du Fonds pour le Journalisme en Fédération Wallonie-Bruxelles

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