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La mobilité douce, mais tout doucement

Médor vous présente chaque jour une nouvelle pièce du personnage indispensable à la vie des Lasnois : leur voiture.

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Colin Delfosse.

Pièce n°3 : freins. Dispositif (mécanique) qui permet de ralentir ou d’immobiliser une pièce ou une machine, notamment un véhicule en mouvement. « La pédale de frein permet aux usagers d’éviter de nombreux accidents et de ne pas terminer dans le ravin », explique très sérieusement une auto-école sur son site web. Chez Médor aussi on a cherché à comprendre quels étaient les leviers à actionner pour ne pas terminer dans le fossé en matière de mobilité.

Comme nous le relevions dans le premier épisode de ce portrait, Lasne est une des communes de Wallonie qui enregistre le plus grand nombre de voitures par habitant. La publication de ce chiffre par Médor n’a pas manqué de faire réagir : « Vous avez vu des Tecs rouler le week-end ? Ou même en milieu de journée en semaine ? » nous interpelle un internaute. « Pour aller à l’école à Genval, mes enfants doivent changer de bus deux fois, ça ne m’amuse pas de jouer les taxis », regrette une maman que nous avons rencontrée.

« Les Tecs ne pourront jamais desservir l’ensemble du territoire rural. L’enjeu est de permettre aux citoyens de pouvoir rejoindre les grandes lignes de bus et de train sans prendre leur voiture », commente la bourgmestre, Laurence Rotthier (MR).

Un projet de navettes comme celles qui circulent à La Hulpe est à l’étude. Mais la bourgmestre ne semble guère très convaincue par sa propre politique… « Dans un territoire aussi étendu, cela prendrait trop de temps de relier les gares. L’objectif est que ces navettes permettent de relier rapidement une ligne de bus qui permettrait ensuite de rejoindre le train ». Une navette, pour rejoindre un bus, pour rejoindre un train… Le tout qui ne serait pas disponible avant l’horizon 2021 ? Mais encore ?

Le programme stratégique transversal, document en préparation qui doit servir d’outil de pilotage pour la politique communale des années à venir, évoque la piste d’une application de covoiturage. Ici aussi, l’élue ne se montre pas plus enthousiaste sur le principe : « les gens n’aiment pas s’ajouter des contraintes quand ils doivent aller travailler ou chercher les enfants à l’école ».

Quant à l’idée, également évoquée dans le programme, de travailler sur un projet de vélos partagés avec les communes voisines ? « Pour rejoindre les gares de la Hulpe, Rixensart, Genval, ça a du sens. Mais se déplacer au sein de Lasne en vélo partagé, ça n’a pas de sens. »

« Avec un habitat très dispersé, une forte dépendance vis-à-vis de l’extérieur pour l’emploi, les commerces et l’enseignement, les Lasnois seront toujours dépendants de leur voiture », assénait le plan intercommunal de mobilité en 2003. La commune travaille sur un nouveau plan de mobilité, mais celui-ci ne devrait pas être prêt… avant deux ans minimum.

Peut-on sérieusement se contenter de ce cul-de-sac en 2019, alors que les voitures sont toujours plus nombreuses sur les routes et les enjeux en matière d’environnement plus chauds que jamais ? « Il y a 15 ans, on pouvait partir après 7 heures du matin pour rejoindre Bruxelles. Aujourd’hui, il faut être sur la route à 6h30 pour éviter les embouteillages », regrette un habitant.

La bourgmestre renvoie la balle dans le camp du citoyen. « C’est notre société qui fait tout ça. On devient très individualiste. On est libre, on vit en démocratie. Chacun peut, s’il en a envie, prendre sa voiture pour faire 200 mètres. Chacun est maître de sa mobilité », se prononce-t-elle derrière son bureau. Des citations encadrées décorent le mur à l’arrière-plan : « Vivre à Lasne c’est… rouler en Porsche ou en mini… conduire la petite dernière à la Papelotte… manger bio de temps en temps… »

Des Lasnois qui veulent changer leur mobilité, pourtant, on en a rencontré quelques-uns. Comme Isabelle, alias Queen of the Rings, qui a fait installer des anneaux pour attacher ses chevaux aux quatre coins de la commune pour garer sa monture le temps d’acheter un pain. Ou Arnaud, qui a longtemps traversé la forêt de soignes en VTT pour se rendre à son travail à Bruxelles. « La commune est très vallonnée. Mais avec le développement du vélo électrique, il y a un vrai potentiel. De plus en plus de gens autour de moi se mettent au vélo. Dans la forêt, le matin, on croise de plus en plus de monde. »

Si des investissements sont clairement nécessaires pour améliorer les pistes cyclables des voiries secondaires, comme nous avons pu le constater par nous-mêmes lors d’une promenade avec la locale du Gracq (le lobby des cyclistes), le territoire recèle quelques atouts : une piste cyclable flambant neuve sur la chaussée de Louvain, un Ravel accessible du côté de Rixensart, et un réseau de pistes cyclables du côté de Braine-l’Alleud qui pourrait aussi l’être moyennant quelques aménagements au niveau de la nationale 5.

La mobilité peut se faire douce, ou se partager. Sur le parking de Sam Drive, à deux pas de l’abbaye d’Aywiers, des camionnettes rouges brillantes sont rangées devant une belle demeure blanche. Michel Renders nous reçoit à l’improviste. Confronté à la galère, que représente pour tout Lasnois, les trajets pour convoyer les enfants à l’école ou à leurs activités sportives, cet entrepreneur a imaginé, il y a quelques années, un projet de taxis partagés. Ce n’est pas une niche que l’entrepreneur vient combler, mais un véritable fossé !

A l’heure de l’uberisation, Sam Drive passe de deux chauffeurs à une quarantaine de salariés. Le matin et l’après-midi, les chauffeurs convoient les élèves à l’école. En journée, ils rendent service aux seniors. Le week-end, ils ramènent les jeunes sorteurs en toute sécurité chez leurs parents. L’objectif de la coopérative, qui investit également dans les outils numériques, est de remplir les minivans le plus efficacement pour faire baisser les prix, rendre le service plus accessible, et atteindre la rentabilité d’ici fin 2020.

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