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546 km de chemins entravés

Sauvons les sentiers

Depuis le mois de juin, Médor enquête avec vous sur les sentiers et chemins publics entravés. Sur medor.coop/sentiers, une carte interactive compile vos signalements et nos reportages. Voici un point d’étape.

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Laura Collard. CC BY-NC-ND

Entre le 15 juin et le 3 septembre, 302 panneaux dissuasifs, barrières illégales ou sentiers labourés ont été géolocalisés sur notre carte participative. Une trentaine de mails nous ont aussi été envoyés à l’adresse sentiers@medor.coop, de la part de citoyen·nes concernés, de groupes soucieux de la sauvegarde des chemins de leur coin, de guides-nature, d’une juriste rodée aux matières de voirie et même d’un étudiant qui vient d’obtenir une distinction pour son mémoire sur les chemins et sentiers vicinaux !

Merci déjà à toutes les personnes qui contribuent ainsi à faire avancer notre enquête. En termes de participation, pour notre petit média indépendant, c’est énorme. Et en travaillant sur le sujet, on a découvert un autre truc énorme : 546 kilomètres de chemins seraient barrés, en Wallonie, et 4 084 difficilement accessibles. Soit 4 630 kilomètres : ça représente quinze fois le trajet Knokke-Arlon et environ 1 020 heures de marche, tout de même. Ces estimations sont celles de l’association « de défense de la petite voirie » Chemins de Wallonie. Sur son site, des bénévoles mettent minutieusement à jour l’état des chemins, leur praticabilité et les éventuelles entraves. Ensemble, ils ont répertorié 87 % du territoire régional.

« Nous avons pu mesurer à quel point le monde agricole, les propriétaires forestiers et les chasseurs, mais aussi les gros propriétaires fonciers ainsi que des propriétaires “ordinaires” en zone urbanisée peuvent se montrer hargneux et de mauvaise foi lorsqu’ils veulent défendre leur cause indéfendable », tance Albert Stassen, président de l’association. Emprunter un chemin public, même lorsqu’il traverse une propriété privée, est pourtant un droit, qu’Albert Stassen aide à faire valoir en prodiguant de l’aide administrative et juridique. Car l’accaparement des sentiers est facilité par le flou qui peut entourer leur statut.

Comment vérifier si un chemin entravé est public ?

Ce qui faciliterait la vie de tout le monde, ce serait qu’une plateforme, idéalement publique, à jour et facile d’accès, répertorie l’ensemble des voiries du territoire. C’était en fait ce qui était prévu par le décret 902 de 2014 relatif à la voirie com­munale, qui visait à actualiser et numériser l’Atlas des chemins vicinaux. Ce document a fixé l’existence des chemins publics ainsi que leur tracé détaillé, en 1841, et sert encore de référence aujourd’hui. Sa modernisation patauge cependant, faute de moyens et de méthodologie uniforme pour un territoire qui ne l’est pas. Les atlas ne sont que partiellement consultables en ligne (sur le site WalOnMap). Pour le reste, il faut se rendre auprès de l’administration communale ou provinciale pour y avoir accès…

Les données de l’Atlas sont incomplètes (certains sentiers n’y ont pas été répertoriés et d’autres ont été créés ou supprimés en près de 200 ans). Lorsqu’un chemin ne se trouve pas dans l’Atlas, cela ne signifie pas qu’il n’est pas public. Il faut donc aussi se pencher sur le cadastre et des observations de terrain. Un travail de bénédictin qu’accomplit Chemins de Wallonie. Bien que le statut de 12 124 km de sentiers reste « à vérifier », cette asso est donc la source la plus fiable à ce jour.

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Notre carte interactive, à retrouver sur medor.coop/sentiers
OSP. Tous droits réservés

À petits pas

« Mais même si l’actualisation de l’Atlas avait abouti, ce n’est pas ça qui allait sauver les sentiers, estime Elise Poskin, chargée de com pour une autre association : Tous à pied. Nous, on s’est dit qu’on allait travailler au niveau micro, avec les communes qui en avaient envie. » À Courcelles, Nivelles, Grez-Doiceau et une dizaine d’autres communes, Tous à pied a repensé des réseaux de cheminement piéton. En 2024, ce sont 2 714 km de petite voirie qui ont été inventoriés et 225 km balisés, avec l’aide de bénévoles.

Tous à pied fédère 24 locales, des groupes de citoyen·nes qu’elle forme sur la législation qui entoure les sentiers, sur les démarches de réhabilitation d’un chemin auprès de la commune ou sur l’accessibilité aux personnes en situation de handicap. Les observations de terrain ou les victoires sont partagées aux autres locales et servent à mobiliser d’autres citoyen·nes et communes. « Tous à pied est la carotte et Chemins de Wallonie est le bâton », résume en riant Chloé Fivet, chargée de mission chez Tous à pied.

Le mardi 8 juillet, une petite troupe de marcheurs et de marcheuses caroténé·es s’est réunie à Lustin, dans la commune de Profondeville, dans le but d’améliorer la signalétique des sentiers locaux. Elisabeth, Alain, Christine et Patrick ont décoré le village d’autocollants affichant « voirie communale » là où le passage n’était pas bien balisé, voire carrément barré. Car les habitant·es de Lustin butent sur la multiplication des entraves et des privatisations, lors de leurs balades de plaisance comme lors de leurs déplacements utilitaires.

Tensions avec le baron local, volontarisme communal et action citoyenne, découvrez notre reportage à Lustin, en septembre, sur www.medor.coop/sentiers.

D’ici là, continuez à vous promener, vous mobiliser et à alimenter notre carte ! Consultez-la et suivez nos reportages ici ou contactez-nous à l’adresse sentiers@medor.coop.

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