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« Sans bagnole, c’est mortel »

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Émilie Seron. CC BY-NC-ND.

C’est un petit garage, où l’on répare de tout. En plein zoning de Tournai, un univers de béton et de routes. À l’heure où tout le monde semble d’accord pour dire qu’il faut réduire la pollution automobile, plongée dans un univers où les clients sont attachés, voire enchaînés à leur voiture. Et où, parfois, la colère gronde.

Un homme s’avance. Il est énervé. Ou fatigué. Difficile à dire. Voûté, les mains noircies, le pas décidé. Il pousse la porte du bureau.

« – Bonjour, vous pouvez peut-être m’aider ?

– Bonjour M’sieur.

– Ils m’ont encore refusé au contrôle technique. Problème de pollution. Je sais pas quoi faire.

– Y a un produit de….

– J’ai déjà mis un produit, là, pour nettoyer. Ils m’ont dit de rouler à fond, pour décrasser.

J’ai roulé comme un démon. J’ai tout démonté, remonté. Ça commence à me rendre fou cette affaire.

– Y a des capteurs sur l’échappement.

–…

– Attendez, je vais vous montrer. »

Les deux hommes sortent du bureau, se dirigent vers la voiture, une vieille Opel de 2008. Ça parle, ça se plie en quatre, ça trifouille, ça reparle, ça se regarde, ça souffle, ça s’entend. Dix minutes plus tard, le client repart avec les conseils de Maxime, en espérant que « ça finisse par passer » au contrôle. Système D. Il n’a pas de quoi faire des frais. Si ça va vraiment pas, il peut toujours revenir et on verra.

Depuis un an, Maxime Larivière a installé son garage ici, dans un hangar du zoning Tournai Ouest. Juste en face du contrôle technique. « C’est le bon plan », explique le jeune homme, 29 ans, qui voit défiler chaque jour au moins une dizaine de clients refoulés au contrôle ou désireux de vérifier que tout est OK avant de le passer. Ce lieu idéal, selon Maxime, c’est donc un immense dédale de béton, de routes parsemées de hangars et de camions. À sa gauche, Waffle Factory, où l’on mange des gaufres fourrées à la viande ou à la fraise ; à sa droite, Mondial Châssis, spécialiste belge de portes et fenêtres. Son champ de vision, des éoliennes – installées ici, pour éviter les nuisances ailleurs. « De toute façon, je sors jamais boire un verre ou manger. » Lui, il bosse.

Ça claque

Tous les jours, lever à 6 h, il s’occupe de sa fille – « je veux pas qu’elle dise plus tard que j’étais pas là », puis direction le garage à 7 h 30, jusqu’à 18 h. Parfois 22 h ou minuit, quand il est débordé. Le midi, un sandwich vite avalé, 10 minutes, c’est plié. Une mécanique bien réglée.

Ses potes disent de lui qu’il ne fait que ça, bosser. Max répond qu’il n’a pas d’amis. « Des potes oui, mais sinon j’ai appris à compter sur moi-même. » La mécanique, il adore. Mais il sait pas comment ça lui est venu. En tout cas pas d’Alain, son père, qui était agent d’entretien dans une maison de repos, avant la pension.

Ouvrir un garage, c’était le rêve de Maxime depuis longtemps. Il a commencé le soir et le week-end, chez ses parents. « Quand je levais les voitures, elles touchaient le plafond. » Puis chez lui, à Velaines. Les gens débarquaient à n’importe quelle heure, même le dimanche, c’était l’enfer. Peu à peu, la clientèle a grossi. Puis il a trouvé ce garage à louer. Et a lâché son taf d’électromécanicien chez Dufour. Sur sa devanture, en grosses lettres, il a inscrit : « Garage LARIVIÈRE ». Ça claque.

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Émilie Seron. CC BY-NC-ND

Comme garagiste, Maxime dit oui à toute réparation, il veille à rester le moins cher du coin en main-d’œuvre – 45 euros de l’heure – et a la réputation d’être réglo. Trois « trucs » basiques, mais qui lui assurent une clientèle fidèle et croissante. Les gens viennent par le bouche-à-oreille. Presque tous ont déjà eu des mauvaises surprises dans de gros garages ou chez des concessionnaires – ici un devis qui passe du simple au double, là un entretien mal fait. Ils sont peu à entretenir une passion immodérée pour la voiture. La plupart en ont une parce qu’ils n’ont « pas le choix ». Pour déposer les enfants, faire les courses, aller au boulot. « Parce qu’ici, sans bagnole, c’est mortel », résume Samy, 20 ans. Chez lui, à la cité du Maroc, à Tournai, passer le permis est sur la top-liste des trucs à faire pour « vivre sa vie », dès la majorité. Samy sait de quoi il parle, il a « carrément déjà loupé un exam, l’an dernier, à l’ULB à Bruxelles, à cause d’un retard de train ». Et louer un kot dans la capitale, « laisse tomber les prix ». Alors maintenant, pour aller à Bruxelles, il prend la voiture de son père. « Par sécurité. »

Pourtant, le topo est clair. La planète brûle et le secteur des transports compte pour 21,5 % des émissions totales de gaz à effet de serre (contre 14,4 % en 1990). Avec un coupable : le transport routier, qui représente 96 % du total des émissions du secteur. Depuis quelques années, la Wallonie s’est d’ailleurs fixé des objectifs ambitieux, pour repenser sa mobilité. Et a trouvé un nom qui en jette : « Vision FAST 2030 ». Un moyen de répondre aux cris d’alarme du GIEC, qui pousse à revoir le système.

Quand on lui demande ce qu’ici on pense de l’urgence de freiner l’usage de la bagnole, des voitures électriques ou des zones de basse émission, Maxime sourit. « Les politiques, t’façon, c’est “faites c’que j’dis, pas c’que j’fais”. » Lui, faut pas trop lui parler politique. Il n’a pas confiance.

Pour l’instant, Maxime a de quoi faire, sous les bagnoles. Car, en Belgique, la voiture reste l’alpha et l’oméga de la mobilité. Prenons la Wallonie. 75 % des ménages ont une voiture ; 73 % des déplacements se font en voiture ; 72,5 % de la population habite à moins de cinq kilomètres d’un grand axe routier et seuls 16 % vivent à moins de 15 minutes à pied d’une gare.

Depuis les années 1950, la Belgique s’est embarquée dans un processus de périurbanisation et de dispersion de l’habitat. Le syndrome quatre façades, pour le dire vite. On construit des logements loin des écoles, des administrations, entreprises ou transports en commun. Et on mise tout sur un des réseaux routiers les plus denses d’Europe, qui permet à chacun de mener sa petite vie en voiture. Un cercle vicieux qui allonge sans cesse les distances. Et fait croître… le trafic routier.

« Ça fait vingt ans qu’on a compris que ce n’était pas la meilleure façon de faire. L’étalement urbain ralentit, mais il progresse encore. Il va falloir des décennies avant d’espérer changer la donne », expliquent Xavier May et Thomas Ermans, économiste à l’Institut de gestion de l’environnement et d’aménagement du territoire (IGEAT) de l’ULB et géographe à l’Institut de recherche interdisciplinaire sur Bruxelles (IRIB) de l’Université Saint-Louis.

Béton au kilomètre

Et puis, vu d’ici, dans un zoning qui ne cesse de grignoter des terres agricoles, on sent bien qu’il reste encore deux ou trois trucs à régler avant d’en finir avec l’étalement urbain. C’est Vincent le premier à nous en avoir parlé, en venant faire l’entretien de sa petite Hyundai d’occasion. Lui est chercheur à Louvain-la-Neuve. En aménagement du territoire. Et ça le fait presque marrer de parler « mobilité » ce matin, entre les hangars et les kilomètres de béton. Hors travail, il essaie de faire sans voiture. À Tournai, le réseau vélo commence à se développer. Mais en regardant autour de lui, Vincent voit comme un hiatus… « Le modèle de ces parcs, c’est de l’extension constante de surfaces sur des terres agricoles. » Déjà 270 hectares de parcelles ont été aménagés et équipés dans ce parc d’activités. Et l’intercommunale IDETA se réjouit de son extension en cours, qui pourrait à terme occuper 400 hectares. Ça fait des emplois. Tant pis si les riverains et agriculteurs de l’ouest de Tournai grognent depuis des lustres, l’accusant de « piller » les surfaces agricoles. Le cas tournaisien n’a rien d’une exception. Un rapport de la Cour des comptes de mars 2023 étrille même la politique wallonne en la matière, dénonçant une « absence de stratégie » et soulignant que les opérateurs préfèrent souvent étendre ces parcs sur des terrains jamais artificialisés, plutôt que d’opter pour la réhabilitation des sites existants, « plus complexe, longue et coûteuse ». Dans la périphérie ouest de Tournai, les hangars poussent à l’horizontale, s’étendant toujours plus loin.

Plein gaz

Heureusement, ce matin, Vincent a réussi à caser son vélo dans le coffre, pour tenter de rejoindre Tournai pendant que sa bagnole est sur le pont de Maxime, « grosse aventure en perspective ».

Maxime, lui, ne le voit quasi plus, ce béton. Il a le nez dedans. À l’adolescence, avec ses potes, ils se donnaient même parfois rendez-vous ici. Pour faire des « runs ». Ces courses de bagnoles, plein gaz sur les grosses artères vides, de nuit, en espérant que la police ou la sécurité ne débarquent pas trop vite. Aujourd’hui, c’est fini tout ça. « J’étais jeune. » Maxime adore toujours la vitesse, la compet. Pendant des années, il a fait du rallye. Il aurait aimé passer pro, ça ne s’est pas mis. Il envisage de s’y remettre… Quand il aura plus de temps. Sur son bureau, bien alignées, ses plus belles coupes.

Pita, 35 ans, vient d’entrer dans ledit bureau. Il est venu pour un réglage de phares. Lui aussi connaît bien le zoning. Il y enchaîne les boulots d’intérimaire dans la logistique. « Je fais 21 h-5 h du mat. Ou 20 h-4 h. Y a pas moyen de rentrer à la maison à pied ou en bus. » Pita commence à avoir des problèmes de dos, alors il aimerait se reconvertir en chauffeur-livreur. Sa sœur lui a offert son ancienne voiture. Une Opel Corsa diesel de 2008. « Mais avec ça, Bruxelles, c’est interdit pour moi. » Pita ne peut plus entrer dans la LEZ (Low Emission Zone), qui interdit l’accès à la capitale aux véhicules les plus polluants. « Avec un pote, on cherche quand même par là, car il y a plus de boulot qu’ici. »

Pita ne veut pas critiquer. Oui, il trouve que la pollution, c’est important de la réduire. Mais quand même. « C’est bizarre d’avoir des zones qui te sont interdites, si tu n’as pas les moyens. Des fois, je me dis que c’est pour chasser les gens qui touchent moins d’argent. »

« La LEZ affecte uniquement les couches à plus bas revenus, signalent les chercheurs Xavier May et Thomas Ermans. Les politiques de réduction de la pollution automobile actuelles intègrent peu la dimension socio-économique dans leur application. La principale réflexion, c’est de mettre des normes d’émissions plus strictes sur les véhicules et donc des freins à la possession et à l’usage de voitures. Les systèmes de péages, les parkings payants, les restrictions basées sur les normes de pollution, tout ça est facilement surmonté par les plus gros revenus. »

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Émilie Seron. CC BY-NC-ND

Eva, elle, a décidé de nier l’affaire. Pendant qu’elle attend que Max remplisse l’airco de sa voiture, la jeune femme de 23 ans nous partage sa technique. « Quand j’arrive à Bruxelles, Waze me dit “attention, vous entrez dans une zone basse émission”. Je lui dis “ouais, OK, c’est bien”. Et je passe quand même. » Elle fait ça depuis avril et n’a jamais reçu d’amende (on est en juin). « Je croise les doigts. Je me dis que je ne suis pas la seule voiture pourrie à rouler à Bruxelles. Ils vont quand même pas tous nous verbaliser, si ? » Selon Bruxelles Environnement, 18 640 amendes ont été infligées pour non-respect des normes LEZ en région bruxelloise en 2022.

Bénédiction

Aujourd’hui, si elle va si souvent à Bruxelles, c’est parce qu’Eva a rencontré quelqu’un. Elle compte peut-être s’y installer. Mais elle habite toujours dans le coin. À Gaurain-Ramecroix, à sept kilomètres du centre de Tournai. Et travaille dans le soin à domicile. « On nous demande d’avoir notre véhicule perso. Et on est payés à la presta. Donc le but du jeu, c’est de pas trop traîner. » Eva a une Golf TDI 5 diesel de 2009. Achetée il y a six mois à un vieux monsieur qui l’a bien entretenue. « Vous avez vu ? À l’arrière, y a un autocollant qui dit qu’elle a été bénie à Péruwelz ! Je le laisse, ça va me porter chance. »

Même si le cas d’Eva est un peu spécifique – son véhicule, c’est son outil de travail –, ils sont nombreux à expliquer que, sans voiture, pas possible d’aller au boulot. Or, là aussi, les inégalités ont la vie dure. Pour les trajets domicile-travail, les employeurs du privé indemnisent beaucoup plus leurs travailleurs à hauts revenus que ceux en bas de l’échelle. Et plus on monte dans les déciles de revenus, plus cette indemnisation concerne… la voiture.

Thomas, lui, est responsable commercial dans un secrétariat social. Mieux que les remboursements domicile-travail, il a une voiture de société. Le sésame pour rouler à l’aise. Un SUV automatique de chez BMW. Mais ce matin, il nous présente sa Mini. Attention, pas une simple mini. « Celle-ci, c’est la Mini spéciale “40 ans”. » Une réplique parfaite des anciens modèles, jusque dans les coutures des sièges en cuir. Un cadeau qu’il s’est offert, pour ses 30 ans. Thomas a toujours aimé les belles voitures. Petit, il les collectionnait en version miniature. Et ça lui fait quel budget mensuel, ces deux voitures ? « Bah quasi rien. Ma Mini, je sais pas trop combien ça me coûte en assurance, peut-être 50 euros par mois, pareil en essence. Pour la voiture de société, tout est payé par la boîte. Vu que je fais 1 000 kilomètres par semaine, ça leur reviendrait beaucoup plus cher de me les rembourser. »

Bientôt l’électrique

Les voitures de société roulent en moyenne deux fois plus que les voitures privées. Elles ont aussi un effet sur la dispersion des entreprises et des habitats. Leur principale vertu : alléger la fiscalité du travail des plus hauts revenus. 51 % des voitures de société sont ainsi enregistrées dans les 10 % des déclarations fiscales présentant les revenus les plus élevés, peut-on lire dans l’étude parue en 2019 sur le sujet dans Brussels Studies. Un régime coûteux pour l’État, inégalitaire et polluant. Les rapports sont unanimes. Mais la Belgique ne semble pas près d’y toucher.

Devant la Mini spéciale 40 ans, on discute pollution avec Thomas. Et son sentiment est clair : « Ce ne sont pas des véhicules comme le mien (il parle de sa BMW de société, là), très moderne, qui polluent beaucoup ! D’ailleurs pour le boulot, ils vont bientôt me faire passer en hybride ou en électrique, donc de ce côté-là, ce sera encore mieux. »

Pour sauver la planète, Thomas suit à la lettre ce que les pouvoirs publics préconisent. « L’objectif principal, c’est de verdir le parc. Avec cette tendance à penser que l’électrique va tout résoudre, expliquent Xavier May et Thomas Ermans (pas le Thomas qui roule en Mini, hein). Mais on ne s’inquiète pas trop de l’augmentation des gabarits de véhicules, par exemple. Quant au parc auto, il augmente de façon continue. Si on le voulait plus écolo, le bon sens voudrait qu’on mène des politiques fortes pour réduire le nombre et la taille des véhicules. »

Or en Wallonie, le parc automobile a augmenté de 14 % entre 2010 et 2022 pour les voitures particulières. Finalement, Eva a peut-être raison de tout miser sur son autocollant « Bénie à Péruwelz ». On n’est plus à ça près pour sauver le monde.

D’abord la clim

Surtout qu’en ce début d’été, ça a cogné dur sur le béton. À 10 h, déjà quasi 30 degrés. Ça défile pour les demandes de recharge en clim. « J’ai fait un post sponsorisé sur ma page Facebook », sourit Maxime.

Mylène, 32 ans, gare sa Toyota Aurus. Un modèle de 2007, 140 000 kilomètres. « Moi j’ai pas vraiment de garage attitré, j’avise quand ça se présente. » D’ailleurs, Mylène est en retard pour le contrôle technique. « Je sais que je vais être majorée. Tant pis. Je fais d’abord la clim. C’est mon confort, il fait trop chaud. » Il y a trois mois, cette aide ménagère a dû changer l’alternateur. Le mois dernier, le voyant entretien s’est allumé. « Toujours des frais. »

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Émilie Seron. CC BY-NC-ND

Au garage, Maxime le voit bien, la plupart des clients font « un peu par-ci par-là, selon leur budget. Surtout que cette année, les pièces ont pris facile 30 % et que les gens ont de plus en plus de problèmes de trésorerie. Et puis la vie se fait de plus en plus à crédit ».

Lui, la vie à crédit, ça ne lui arrivera pas. Car Maxime a un plan. Bosser, bosser, bosser, et puis dès qu’il aura assez, prendre sa petite famille et se barrer au soleil. Punt. Ça sera peut-être l’Espagne. On verra.

D’après les données Iweps, le poste « voiture » tourne autour de 15 % du budget des ménages. Mais les frais « nécessaires » (entretien, carburant, réparation) constituent une part bien plus importante des dépenses au sein des ménages aux revenus les plus faibles. « Les personnes qui ont du mal à acheter un véhicule ont tendance à prendre des vieilles voitures. C’est un vrai gros problème, car du jour au lendemain, elles peuvent plonger dans une précarité plus forte », s’inquiète Thomas Ermans.

Avec Mylène, on se met à l’ombre pour discuter. On parle mobilité alternative, climat, pollution. « Peut-être qu’on manque d’infos sur les possibilités, mais là, franchement, moi je me sens juste oppressée par la vie. Désolée, c’est ce qui me vient. Je suis oppressée. » Mylène raconte sa journée type. Se lever, préparer les enfants, les emmener à deux endroits différents, aller bosser, faire les courses vite fait, enchaîner, rechercher les enfants, rentrer, les devoirs, manger, se coucher. « Si on m’enlève la voiture, laisse tomber. C’est ma seule liberté. Ça me permet de faire vite tout ce qu’il faut, de façon presque automatique. Je vois bien que c’est un cercle vicieux. Mais je n’ai pas d’autre piste. » Ironiquement, la voiture est devenue son dernier espace de liberté…

Tomorrowland

La promesse de liberté, c’est d’ailleurs ça aussi la clé de voûte du système. Liberté de partir en vacances en famille quand on n’a pas les moyens de prendre l’avion, « avec juste une tente dans le coffre ». Liberté d’aller rejoindre sa caravane dans les Ardennes, d’aller pêcher avec un coffre adapté ou de se rendre dans son jardin partagé. Liberté de partir sur un coup de tête en week-end à la Côte ou juste au centre commercial. Toutes ces voix entendues en mai et juin 2023 au garage Larivière, ces voix qui ne représentent qu’un petit bout du monde, mais qui, toutes, s’accrochent à leur voiture.

C’est peut-être aussi ce que fait Maxime, à sa façon. Transformer ce qu’il a sous la main en ticket pour souffler. Allez, encore une semaine le cul sous les bagnoles et c’est la quille. Ce week-end, il prend le large. À Biscarosse, avec sa femme et sa fille. Pour 15 jours. Pas encore la belle vie en Espagne. Mais c’est déjà ça. Sur son poste Makita, Max met du son. Sa radio fétiche : Tomorrowland. En attendant les plages et le soleil. Demain.

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