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Les mille odyssées

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Julien Meert. CC BY.

C’est l’homme qui murmure à l’oreille des comateux. Le neurologue Steven Laureys traque avec ses machines l’essence de la conscience sous le scalp des moines bouddhistes, des astronautes, des apnéistes, des hallucinés. Quand il ne pilote pas la plus vaste étude sur les expériences de mort imminente. Plongée aux frontières du réel dans l’un des cerveaux belges les plus éveillés.

LE COUP DE SONDE

Première immersion dans le cortex cérébral du Dr Laureys. Face clinique. Et premier électrochoc. Dans l’un des 895 lits du CHU de Liège, une sexagénaire est en position semi-assise, a les yeux grands ouverts et respire sans artifice. Un leurre. Confirmation par une batterie de tests et autant de tentatives d’entrer en contact avec elle. « Vous vous appelez Jeanne ? Non ? Sabine ? » Cette patiente est dans le coma. Plus exactement dans ce qu’on appelle un état d’éveil non répondant. Jusqu’au moment où… elle répond à l’au-revoir du neurologue. Sous les yeux médusés de son fils avachi. « C’est grâce au nouveau traitement que vous avez prescrit, Docteur ! » Steven Laureys serait-il le nouveau messie ? C’est que le diagnostic de celui qui martèle « Ni Dieu ni maître » fait pourtant aujourd’hui figure de Graal. « Ces malades sont des artefacts de la médecine moderne. Ils peuvent rester comme ça pendant 30 ans. Certaines familles de patients me prennent déjà pour un demi-dieu, alors, s’il vous plaît, ne donnez pas de faux espoirs à vos lecteurs. »

Le Coma Science Group qu’il pilote au sein de la forteresse liégeoise et de l’ULg n’en est pourtant pas à son premier miracle. Le plus édifiant – et terrifiant – se nomme Rom Houben. Diagnostiqué « légume » et alité durant vingt-trois ans, ce quadra belge a fini par atterrir au centre hospitalier où, en 2006, l’équipe de Laureys s’est rendu compte qu’il n’avait jamais perdu conscience ! Un cas de « locked-in syndrome » (syndrome d’enfermement), de conscience emmurée, comme en a été victime Jean-Dominique Bauby, auteur et héros malgré lui du best-seller Le scaphandre et le papillon. « Ces patients ont un cerveau lucide mais déconnecté de leur corps paralysé. Ils sont donc handicapés moteurs mais complètement conscients. Alors, ce diagnostic-là, il ne faut pas le rater. Surtout que certaines décisions vitales sont parfois prises en stoemelings par les hôpitaux et les maisons de repos… »

Combien de comateux finissent ainsi leur vie dans des centres de soins ou des seigneuries, conscients mais prisonniers de leur silence ? Selon une étude réalisée par le service du Pr Laureys, 40 % des patients en état végétatif ont en réalité des signes de conscience. Des indices que Steven Laureys traque depuis plus de vingt ans à coups de tests basiques, comme celui de la reconnaissance dans un miroir, de dé­charges électriques – « durant 20 minutes et désormais sans faire de trous dans le crâne » –, d’imageries médicales ultrasophistiquées et d’interfaces cerveau-ordinateur.

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Julien Meert. CC BY

À l’aide de ce protocole pointu et de son équipe de choc – une trentaine de médecins, neuropsychologues, chercheurs, mathématiciens et ingénieurs –, Laureys dispose dès lors d’une semaine pour détecter des niveaux de conscience jusque-là indétecta­bles. Même lorsque ces patients en état végétatif sont incapables de bouger le petit doigt ou la paupière pour répondre à ces SOS, le neurologue un peu fou tente alors la télépathie. Version scientifique. Il place le mort-vivant dans une IRM (imagerie par résonance magnétique), LA machine à observer le cerveau, et s’adresse à lui dans un langage codé. « Pour dire oui, pensez à un citron, pour dire non, imaginez-vous en train de chercher votre chemin. » Ce qui se traduit par une montée d’acidité dans la bouche du comateux ou une activation de la région de l’hippocampe, située au cœur du cerveau et responsable de la navigation spatiale.

Autant de systèmes D destinés à redonner une voix à tous ceux que le coma a bâillonnés. À quel point souffrent-ils ? Ont-ils conscience de leur état ? Souhaitent-ils mettre un terme à leur agonie ? Bref, rien d’évident ou d’insignifiant à faire passer. « Ces personnes sont pourtant oubliées, négligées par la médecine. Or, demain, dans ce lit, ça pourrait être vous ou moi. » La peur serait-elle le véritable moteur de cette sommité mondiale aux 500 publications ?

L’ANALYSE DU GÉNOME

Direction son ADN. Comment, Laureys, un kid de Hoeilaart (Brabant flamand) au portefeuille affublé d’un autocollant « Je suis Flamand et j’en suis fier », a-t-il fini Officier du Mérite wallon ? Comment ce fils de serriste, né sous une grappe de raisins bleus, est-il devenu examinateur de conscience ? « Une histoire, ça se construit et se déconstruit. C’est difficile à expliquer. » Pas tant que ça. En parfait storyteller, Laureys pousse le curseur de sa bio un cran plus haut. C’était le 24 décembre 1968. Il y avait des paquets de neige. La Mini de ses parents arrive dans un hôpital de Louvain et un jeune médecin pratique d’urgence une césarienne. « C’était sa première intervention, et ma mère a perdu beaucoup de sang. Assez, en tout cas, pour marteler durant mon enfance que j’étais là grâce à la médecine et que j’allais la servir. » Féru d’anatomie mais aussi d’astrophysique, Steven Laureys s’orienta vers la neurologie. Logique. « C’est le domaine le plus théorique et celui qu’on comprend le moins. C’étaient les années 90 et la neuro-imagerie faisait la cover du Time. On apercevait enfin l’activité du cerveau ! »

Après un passage chez les rats pour tester leurs mécanismes neuronaux de la douleur et, par la même occasion, sa résilience au sadisme – « Je me sentais mal de les faire autant souffrir » –, le jeune chercheur dévoile ses résultats sur l’identification du circuit de la conscience lors d’un congrès mémorable. Trop tôt, sans doute. Le monde académique n’est pas encore prêt à aborder les questions que Steven Laureys se pose. « J’ai encore des confrères, notamment ceux qui étudient l’animal, pour qui la conscience n’existe pas. »

Sans parler de tous les méandres éthico-pragmatiques inhérents à sa prise de conscience à lui. Du diagnostic de mort cérébrale – le premier point de non-retour,
« sauf si la patiente est enceinte, auquel cas nous devons travailler dans un cadavre pour sauver le nourrisson » – au don d’or­ganes. De l’arrêt thérapeutique à l’euthanasie. « On a toujours raison quand on arrête le respirateur… », déplore le neurologue.

Une pique assenée à ses confrères dont les diagnostics ne s’encombrent pas toujours de ces « considérations ». Psychologue et chercheuse au Coma Group, Olivia Gosseries insiste : « Je connais des médecins français qui refusent de garder un patient en état végétatif dans leur service. Ou il récupère, ou il meurt. »

Laureys, lui, ne renie pas son ADN et poursuit sa quête, malgré les fréquentes menaces de la part des familles, des lobbies pro-vie ou pro-euthanasie. « Refuser une demande d’arrêt thérapeutique est plus facile que de l’accepter, je peux vous l’assurer. » Mi-savant fou, mi-chevalier blanc, mais très identifiable sur un plan philosophique – « Je suis prêt à mourir pour défendre le libre examen » –, ce directeur de recherche au Fonds national de la recherche scientifique (FNRS) n’est en tout cas jamais là où on l’attend. « Il faut arriver à le suivre, sourit l’une de ses proches collaboratrices. D’autant qu’il a tellement d’idées qu’il en oublie certaines. Alors s’il en parle une deuxième fois, même sans s’en rendre compte, on le prend au mot… »

Des pistes qui engagent souvent l’équipe de Laureys au croisement de la science et de la religion. Un sacré choc. Comme lorsqu’il participe, en 2004, à un congrès sur les soins palliatifs et l’état végétatif, organisé par… le Vatican. « La moitié des orateurs étaient théologiens ou évêques et ils ne citaient jamais la revue scientifique The Lancet mais bien des passages de la Bible… Je pensais néanmoins que nos discussions allaient pouvoir influencer le cours de l’histoire. Mais, dans son résumé, le pape Jean-Paul II a imposé sa vision sans en tenir compte. Selon lui, on ne pouvait jamais arrêter les machines. Ce que contredisaient pourtant déjà les hôpitaux universitaires catholiques. J’ai donc refusé de signer ce docu­ment, malgré une seconde convocation. Et je n’ai plus jamais été invité au Vatican. »

LE SCAN APPROFONDI

Cosmonaute de la conscience, en quête de ses états les plus altérés, Laureys multiplie les offensives aux frontières du réel. « Il a d’ailleurs toujours rêvé d’intégrer la NASA ! », embraie une neuropsychologue du centre hospitalier liégeois. Là, on commence d’ailleurs à perdre le contrôle de ses synapses. Ça part dans tous les sens. Anesthésie, rêves, hypnose, méditation : difficile de garder le contrôle sur les synapses hyperactives du Dr Laureys… Arrêtons-nous plutôt sur ces 48 heures passées à scruter la matière grise éveillée du bouddhiste Matthieu Ricard en quasi-lévitation. « J’ai observé des réponses que je n’avais jamais vues ! Son cerveau est câblé différemment et il arrive à contrôler ses pensées, son niveau d’attention et ses émotions de manière extraordinaire. Il a beau avoir 70 ans, c’est un athlète du mental. »

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Julien Meert. CC BY

C’est surtout sa faculté à faire le vide qui a épaté le neurologue. « Vous arrivez à ne penser à rien, vous ? Moi, non. Or, on voit bien que son activité, et surtout sa connectivité cérébrale, augmente quand il médite et diminue fortement quand il entre en mode zombie. Et quand on lui a demandé si on pouvait aussi analyser son sommeil, il a fermé les yeux et s’est endormi en un claquement de doigts ! On attend maintenant d’analyser des moines tibétains. »

Mais Laureys planche également sur l’activité cérébrale des locataires de la Station spatiale internationale ou les scans de cerveau du quadruple recordman du monde d’apnée, le Français Guillaume Néry. « Il a fait une plongée de sept minutes chez nous avec des électrodes. Étudier un état de conscience à ce point modifié mais doté d’une très grande lucidité est très intéressant. C’est d’ailleurs assez proche de l’expérien­ce de mort imminente (EMI). Et puis, toutes ces recherches sont vitales, car elles constituent autant de bulles d’oxygène pour mon équipe, dont le travail clinique est particulièrement pénible. »

L’occasion, aussi, de braquer un énième coup de projecteur sur lui-même. Malgré son agenda de ministre, ce dandy au sourire king size et au français impeccable ne rate jamais une occasion de débarquer – son propre cerveau imprimé en 3D sous le coude – sur les plateaux de télé. Même les plus barrés. Pour Return from the dead du National Geographic, l’éminence du Coma Science Group n’a pas hésité à endosser le rôle de cobaye. Et tenter la décorporation à l’aide d’un casque de réalité virtuelle afin de vivre cette sortie du corps relatée lors de nombreuses EMI. « Mon cœur s’est emballé, c’était très impressionnant ! » Avant de se payer un tour de centrifugeuse ou de se faire injecter de la psilocybine, la substance active des champignons hallucinogènes, et de passer… une IRM. « C’était la première fois et je déconseille à tout le monde un trip dans cette machine ! »

On diagnostique aussi chez Laureys une autre pathologie : la mythomanie. Dont les deux dernières victimes sont des officiels de la FIFA, la fédération internationale de foot. Laureys travaille sur les traumatis­mes liés aux coups de tête répétés sur un ballon rond. « En un sens, quand je les rencontre, je leur mens un peu. Je vends un projet où je prétends savoir exactement ce que je cherche, ce que je vais trouver et à quel moment. Et même ce que cela va coûter ! Ce n’est évidemment pas comme cela que ça fonctionne. Mais tous ces champs de recherche sont nécessaires, car nos contributions potentielles ont souvent été réalisées par hasard. Comme la grosse majorité des découvertes scientifiques. »

L’EXPÉRIENCE INTERDITE

Allons-y pour la décorporation et tendons l’oreille dans les couloirs. Malgré le protocole unique mis au point par son équipe afin de traquer le moindre signe de conscience dans le cerveau et les demandes de doctorats qui affluent des quatre coins du globe, les champs de recherche explorés par le neurologue flamand laissent parfois indifférent. Voire agacent.

Certains confrères se demandent d’ail­leurs s’il est louable de s’attribuer les mérites de découvertes réalisées dans un domaine qu’ils considèrent comme dénué d’intérêt. « Étudier autre chose serait plus facile, se défend Laureys. Par définition, les patients ici ne collaborent pas. Ils bavent, sont incontinents et alités au point de se trouer la peau. Ça n’a rien de sexy. »

La mort imminente est le champ de recherche où Laureys largue sans doute le plus de confrères en route. Mais nous, on lui colle plus que jamais aux mocassins et on le retrouve quelques jours plus tard à la Cité miroir, à Liège, pour l’écouter sur le sujet. Vulgarisées dans les années septante par la bible du genre, La Vie après la Vie, du Dr Raymond Moody, les EMI refont aujourd’hui surface. Des séries B d’anticipation s’y aventurent. À l’image de la très imparfaite The OA d’Amazon, qui creuse ce terreau fertile jusqu’à la roche. L’une ou l’autre enquête journalistique ose franchir le Rubicon. Dont la dernière trône en tête de gondole chez Albin Michel. Elle est signée par le Français Stéphane Allix, journaliste français, grand spécialiste des bizarreries. C’est dire…

Dans l’auditoire liégeois où nous avons suivi Steven Laureys, les trois premiers rangs sont squattés par des personnes âgées, les suivants par des étudiants en médecine ou en psycho. Principalement des femmes. « Je suis déçue, je pensais qu’il irait beaucoup plus loin », peste déjà une jeune psy bruxelloise attirée par l’aura du gourou. Après une mise en bouche effectivement un peu fade sur les niveaux de conscience, Laureys s’efface devant un barbu de 70 balais, cardiaque chronique et heureuse victime d’une EMI. La scène se passe chez lui, un après-midi. À la suite d’une angine de poitrine, l’homme s’affale sur son canapé et perd connaissance. Au sens médical du terme.

« Je me retrouve alors à l’extérieur de mon corps, sous forme de vapeur, d’ouate. Je flotte près du plafond et j’observe froidement la situation. Mon corps est à trois mètres de moi, allongé sur le sofa, mes yeux sont fermés. Je perçois les cris de mon fils qui a 22 ans et se tient à genoux à côté de mon cadavre. Il me tourne le dos mais je perçois ses larmes. Et je vois, à travers les murs, ma femme attendre l’ambulance devant la maison. Je capte les événements, les émotions, sans ressentir le besoin d’y répondre. Je n’ai aucune appréhension. » Jusqu’au moment où ce père de six enfants se sent violemment aspiré par son corps et qu’il entre en lui par le centre du front…

Illusion, rêve, hallucination ? Pour ce passager revenu de l’au-delà, cela ne fait aucun doute : la conscience, l’âme ou peu importe le nom qu’on lui donne, continue de vivre en dehors de notre organisme. « Lorsque je flottais, je me souviens très bien avoir observé, très étrangement, une araignée sur le plafond. J’admirais ses déplacements, les détails de sa toile. Et quand j’ai repris connaissance, que les secours m’ont emmené sur la civière, on est passé sous ce coin de plafond et je l’ai revue. Je n’avais donc pas halluciné. » Laureys reste stoïque face à ce témoignage. Il intervient juste comme modérateur lorsqu’une spectatrice s’interroge sur l’utilisation thérapeutique des baguettes de sourcier… Clac. Là, il se montre cinglant : « Nous sommes très ouverts, mais il est impératif de dissocier croyances et recherche médicale. »

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Alors, à défaut de croire, que sait ce scientifique athée sur ces mystérieuses expériences de mort imminente ? Sont-elles des délires provoqués par la défaillance du cerveau asphyxié ? Un ersatz terrestre de l’ivresse des profondeurs ? « Le manque d’oxygène n’est pas une bonne piste, car le phénomène, qu’il soit d’origine cardiaque ou traumatique, est assez comparable. En tout cas, c’est difficile à comprendre tant qu’on ne l’a pas vécu. C’est pour cela qu’il faut écouter ces patients. Au lieu de se montrer arrogants et juger les propos de ces millions de gens inintéressants, voire déments. » Et le professeur d’insister pour lancer un appel à témoins afin de compléter sa base de données. À ce jour, elle contient déjà 600 témoignages, dont celui de sa propre mère. Avis aux walking deads

Qu’ils aient fait leur coming out ou non, ces ressuscités sont légion. D’après Laureys, 10 % des personnes qui font un arrêt cardiaque expérimentent une EMI. Dans laquelle ils voient leur vie défiler ? Oui, mais pas aussi souvent qu’on ne le montre à la télé. En revanche, ces morts-vivants ont pour la plupart des expériences de décorporation, rencontrent fréquemment des personnes disparues et voient cette lumière au bout de ce fameux tunnel.

Malgré quelques variantes culturelles – les Indiens y voient une rivière, les musulmans, une porte –, les expériences recueil­lies par le Coma Science Group en provenance des quatre coins du monde se suivent et se ressemblent. « Certains y voient la preuve que l’âme existe et qu’elle quitte le corps. Je n’ai en tout cas pas fait d’observations scientifiques qui confirment cette hypothèse. Nous, on essaie d’écouter ces patients et de tenter d’expliquer le phénomène avec des mesures d’activité cérébrale. » Mobilisés sur une question centrale : comment diable ces personnes peuvent-elles avoir des perceptions aussi riches et intenses alors que leur cerveau s’éteint ?

Quant à penser que ces good trips – l’écrasante majorité des EMI produisent un sentiment de bien-être – seraient annonciateurs d’une vie après la mort, le neurologue préfère se taire et brandir à nouveau le joker du libre examen. « La seule preuve scientifique d’une vie après la mort est le don d’organes. Un corps peut sauver sept vies. Sinon, même si ça fait bien chez le coiffeur, personne n’est jamais revenu de la mort. » OK. Mais n’y a-t-il pas une once de probabilité que la vérité sur ces expériences soit un peu moins carrée que prévu ? « Ces hypothèses spirituelles influencent d’autres équi­pes de recherche, assure une doctorante du Coma Group, mais pas ici. Laureys, lui, prend clairement position. La conscience, c’est le cerveau. » Point.

Et il entend bien le prouver et affronter les critiques, celles de ses confrères mystiques ou de ces neurologues plus préoccupés à « sauver des vies » qu’à évaluer le degré d’éveil d’un comateux sur une échelle de 0 à 1, ou à mener des analyses sur les EMI. « On a beau me répéter que ce n’est pas sérieux et que ce sont juste des hallucinations, je trouve au contraire que ces expériences sont fascinantes. Et je reste persuadé qu’il est impossible de comprendre la vision en couleur quand on se contente du noir et blanc. »

Une vision de plus en plus dépendante des machines qui permettent seulement maintenant d’identifier et de quantifier une activité cérébrale. Sans vraiment en comprendre les mécanismes. Mais Steven Laureys le sait pertinemment bien : si les probabilités d’expliquer l’inexplicable avec les technologies actuelles sont extrêmement faibles, une découverte majeure dans le domaine et c’est le Nobel assuré. Son rêve secret.

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