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Les deux carrières d’Antoinette
Episode 1/3
Textes et photos (CC BY-NC-ND) : Salomé Lauwerijs & Agathe Decleire
Publié le
Antoinette, étudiante, divise sa vie de travailleuse du sexe en deux : une première carrière sur le trottoir de l’avenue Louise, contrainte par sa compagne de l’époque, puis une deuxième, volontaire, via des annonces en ligne dans le but de s’offrir une opération chirurgicale.
La lune brille haut dans le ciel. Il est passé trois heures du matin. Antoinette ne dort pas. Elle est assise derrière son bureau, le visage illuminé par l’écran de son ordinateur. Tout est calme. Une fois de plus, une insomnie la tient éveillée. Elle ne s’en plaint pas, elle a l’habitude. Ses nuits blanches lui permettent de se plonger dans l’un de ses journaux préférés ou d’ouvrir un nouveau livre féministe. Sur son bureau, une tasse en porcelaine d’une autre époque fume doucement. La seule chose qui l’inquiète, c’est qu’elle a un cours demain et qu’elle ne veut surtout pas le rater. Elle espère qu’elle arrivera à dormir quelques heures.
18 mois sur le trottoir
Non loin de là, les lampadaires de l’avenue Louise (Bruxelles) illuminent la ville. Cette artère est, pour beaucoup, synonyme de magasins de luxe et de belles demeures. Pas pour Antoinette. Elle lui rappelle des souvenirs d’un autre temps, lorsqu’elle était victime de traite en vue d’une exploitation sexuelle. Elle y a passé de nombreuses nuits, seule, sur un bout de trottoir, à attendre qu’une voiture s’arrête, qu’un client se présente. Elle a connu le froid, la pluie. Mais il n’y avait pas que la météo qui pouvait la tourmenter. Travailler sur le trottoir, c’était travailler dans la peur. Peur de la police, peur des moqueries, peur des agressions. D’autant plus qu’Antoinette est une femme transgenre.
L’idée de tapiner au bord de la route ne venait pas d’elle. C’était sa copine de l’époque qui …