Les entrées des matchs de jeunes ? Emportées par le patron
Quand Abdellah Achaoui rentrait avec la caisse des matchs chez lui…
Enquête (CC BY-NC-ND) : Philippe Engels
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Le patron de l’École des jeunes de l’Union Saint-Gilloise, Abdellah Achaoui, a rendu son tablier. Mais pas la recette des matchs joués à domicile. Plus de 6 000€ seraient entre ses mains. « Pas normal », pour la direction. Le socialiste reste échevin et remplaçant de la bourgmestre Catherine Moureaux, à Molenbeek.
Chaque week-end, c’était devenu une routine à l’Union, club de foot de Division 1B professionnelle. Au complexe sportif du Barca (près de l’hôpital Erasme) et au « Bens » (à Uccle), où les jeunes unionistes accueillent leurs adversaires, Abdellah Achaoui déposait à chaque fois, ou presque, son fils et un ami.
Ils étaient chargés de récolter les entrées aux matchs. Oh, pas grand-chose. Trois euros que les visiteurs mais aussi les parents des joueurs de l’Union Saint-Gilloise paient en tant qu’entrée, par tradition et solidarité. Après le coup de sifflet final, le président, administrateur délégué et gestionnaire de l’Ecole des jeunes – cumulant ces postes depuis le début de la saison – venait récupérer ses guichetiers familiers et surtout la recette, à bord d’un SUV Nissan. « Ce n’était pas ce qu’on lui demandait. Le club a des bénévoles pour ça », commente aujourd’hui la direction de l’Union.
La scène répétée a intrigué pas mal de parents. Elle a même été immortalisée en photo. Mais désormais, c’est du passé. Au cours d’un conseil d’administration où la démission du président Achaoui a été actée, ce mardi 28 janvier en début de soirée, il a été constaté que la caisse noire du Barca et la caisse métallique bleue du Bens manquent au décompte de ces cinq mois d’une gestion nerveuse et controversée. « Mr Achaoui avec la caisse en main, ça n’allait pas. Ce n’est pas bon pour notre image », dit la direction. Elle aurait pu s’en rendre compte plus tôt.
Selon les recoupements de Médor, la somme à restituer à l’Ecole des jeunes dépasserait les 6 000 euros pour la période s’étalant de la mi-octobre à aujourd’hui.
La précision du montant n’est pas confirmée officiellement. Au gré des circonstances, la recette hebdomadaire des matches de jeunes (et de la buvette) a oscillé entre 450 et 600 euros. Elle est assez stable. Une certitude, confirmée lors du conseil d’administration de mardi : cette somme composée de petites coupures et de pièces n’a pas été versée au compte de l’asbl Ecole des jeunes de la Royale Union Saint-Gilloise, détenu auprès de la banque Belfius. La cagnotte se trouve toujours chez l’échevin Achaoui… C’est confirmé par les dirigeants du club. Nous avons contacté Abdellah Achaoui pour savoir l’usage qu’il comptait en faire. Il n’a pas été possible de le joindre.
Chez les jaunes et bleus, l’échevin « rouge » de Molenbeek aura multiplié les faux bonds. Selon des parents de l’Union Saint-Gilloise ou des entraineurs des équipes de jeunes qui venaient lui réclamer leur paye, Abdellah Achaoui a répété en décembre 2019 qu’il était là à titre bénévole. Il nous l’a réaffirmé quand nous l’avons rencontré le vendredi 17 janvier – lire l’article publié ici. Or, il apparaît que la structure professionnelle de l’Union versait bel et bien 1 250 euros mensuels à Achaoui, qui a présenté ses factures via une société créée pour l’occasion. « Pourquoi ne vous a-t-il pas dit la vérité ? », s’est demandé le président d’honneur de l’Union Charles Picqué (PS), bourgmestre de Saint-Gilles depuis 35 ans. « Je ne comprends pas non plus », nous a déclaré hier le CEO du club Philippe Bormans, reconnaissant dans la foulée l’existence d’une convention de consultance le liant à Abdellah Achaoui.
Cette convention semble avoir échappé à celle qui a fait venir le Molenbeekois à Saint-Gilles. « Je ne savais pas qu’il était rémunéré par le club », s’est exprimée l’échevine saint-gilloise des Sports Cathy Marcus (PS également) auprès de la Dernière Heure. Fameux cafouillis, tout de même.
A cela, il faut ajouter l’indemnité de 500 euros payée mensuellement par l’Ecole des jeunes – Abdellah Achaoui l’a admis hier face à des journalistes. C’est légal, selon lui. Au total et sans compter l’usage éventuel des recettes de match, les missions cumulées par l’échevin, à Molenbeek et à Saint-Gilles, lui ont assuré un revenu mensuel net d’au moins 5 500 euros. La question : cette double mission était-elle gérable de front ? Ce mercredi (29 janvier), la bourgmestre socialiste Catherine Moureaux réagissait à la démission de M. Achaoui du club unioniste : « Je vois cela d’un bon oeil, il est important pour une commune de 100 000 habitants de compter sur des mandataires à 100 % présents. »
On régularisera plus tard
A deux reprises au moins, en novembre dernier, l’échevin Achaoui admet aussi avoir proposé ses services et accepté les ordres de mission venus de la structure professionnelle de l’Union : à l’approche des rencontres de Division 1B Union-Westerlo (8 novembre dernier) et Union-Beerschot (1 décembre), il est allé retirer des pièces au guichet et des billets au distributeur automatique d’une agence Belfius de Saint-Gilles. Pour quoi faire ? L’échevin entremetteur et la direction du club pro convergent autour d’une même version. Il s’agissait juste d’une forme de prêt d’argent cash, venant des jeunes en formation aux pros de la D1B.
Repris en 2018 par des investisseurs anglais, le club ne pouvait avoir accès à du liquide en quantité suffisante pour alimenter ses fonds de caisse pour la vente des guichets ouverts au public, à l’entrée du stade Marien (Parc Duden, à Forest). Ce problème s’est posé pendant quelques semaines. Pour le retrait d’espèces de 6 735 euros du vendredi 8 novembre, le « remboursement » s’est opéré à l’euro près dès le 21 novembre avec une justification bancaire assez claire : « Versement du fond de caisse ».
La séquence a été différente lors du prêt du 29 novembre. Ce vendredi-là, le retrait de liquidités s’est effectué en sept opérations successives et il n’y a pas eu de justification sur les extraits de compte : 2 retraits de 250 euros, 1 de 325, 3 autres de 500 et enfin un dernier de 450 euros. Soit un total de 2 775 euros en billets. Et là, le remboursement n’a pas été immédiat. Pourquoi ? Les deux parties conviennent qu’une balance comptable aurait été effectuée, intégrant tous les retraits et dépôts de novembre (le mois où le cash se refusait aux Anglais). Il fallait être fin financier pour s’y retrouver. Pas sûr que quelqu’un y soit arrivé.
En tout cas, la direction de l’Union confirme aujourd’hui que le problème n’est pas résolu. Abdellah Achaoui et l’académie qu’il a pilotée dans une sorte de brouillard doivent encore, à ce jour, l’équivalent de 2 500 euros au club pro. A ajouter aux 6 000 euros des matches de jeunes, qui ont quitté les radars. Le tout en cinq mois de direction.
En jouant autant avec les billets, on s’emmêle les mains, se brûlerait-on les doigts ? A Molenbeek, où Abdellah Achaoui est échevin de la Mobilité, des Espaces verts, de l’Énergie, de l’Environnement et de la… Simplification administrative, Ecolo et le Cdh ont demandé à la majorité PS-MR de faire la transparence sur cette affaire.
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Le 28 novembre, soit la veille de ce retrait, le compte de l’asbl Ecole des jeunes de l’USG a été crédité de 160 000 euros. La partie principale d’un subside régional annuel de 200 000 euros, censé embellir l’image de Bruxelles.
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