Victoires de putes
Un métier decriminalisé, une justice respectée
Arthur n’a pas payé une prestation de Clémence. Hors de question pour elle de se laisser faire. Et tandis que la pute traîne son client au tribunal, le métier est décriminalisé. Pendant deux ans, ces grande et petite histoires vont s’écrire en parallèle, tendant vers un même objectif : normaliser la prostitution.
Clémence (prénom d’emprunt) n’aime pas le mot « prostituée ». « Il induit une dimension passive. On est prostituée “par”. C’est un participe passé. Ou on “se” prostitue. Grammaticalement, il y a une dimension réflexive, comme si on devenait l’objet. Cela ne me convient pas. Je préfère “pute” même si le mot vient de “puant”. C’est pas top non plus. Je ne suis pas une “sale pute”. Je suis une pute propre (rires) ! »
Clémence vit seule dans une maison ouvrière du Hainaut, non loin d’une nationale et son lot de magasins alignés. La porte d’entrée est percée d’un judas. Elle s’ouvre sur un salon, que l’on traverse pour rejoindre la cuisine, atteindre les escaliers, monter la vingtaine de marches, tourner à gauche et rejoindre la chambre. C’est là que Clémence travaille.
Elle a un chat vieillissant, des livres de philo qui côtoient des livres de cul, Jouissance club et autres manuels pour une fornication de qualité. Dans les toilettes, un livre sur les pensées d’Héractète, philosophe grec qui n’existe pas. Licenciée en philosophie, Clémence se méfie des apparences et des mots. Peut-être pas assez des hommes.
28 octobre 2019
Dans l’après-midi, elle ouvre la porte à Arthur (prénom d’emprunt). Il a son téléphone en main, l’app bancaire BNP-Paribas-Fortis s’affiche sur l’écran. Il n’a pas de cash, mais il est déjà venu, Clémence le connaît. En confiance, elle lui dicte son numéro de compte, Arthur encode le virement …