Tramadol : l’anti-douleur indomptable
Gouvernement en affaires courantes oblige, la Belgique stagne face aux opioïdes
Enquête (CC BY-NC-ND) : Olivier Bailly
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16 janvier 2020, la France se réveille la gueule un peu moins sous anti-douleurs. Son Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) vient de réduire à trois mois la durée de prescription des antalgiques contenant du tramadol. En Belgique, malgré les recommandations d’experts, rien ne bouge. Notamment parce que le gouvernement belge est en affaires courantes…
Pourquoi le tramadol, cet anti-douleurs opioïde « moyen » (dit de palier 2), est-il dans le collimateur des autorités publiques françaises ? Parce que le Français s’en gave. Il est l’antalgique opioïde le plus consommé dans l’Hexagone, avec une augmentation de 68 % entre 2006 et 2017.
Et c’est un problème ? Assurément. Le tramadol n’est pas du sirop de grenadine. 400 mg par jour équivalent à 80 mg de morphine. Le tramadol est le champion des antalgiques opioïdes mentionnés dans les notifications d’usage problématique du réseau d’addictovigilance.
Il est aussi sur la plus haute marche du podium dans les décès de l’enquête « Décès Toxiques par Antalgiques ». En quatre ans, le Tramadol a tué directement 129 personnes en France (selon l’État des lieux de la consommation des antalgiques opioïdes et leurs usages problématiques, ANSM, février 2019).
« Le fait qu’une mesure soit prise en France est déjà un signe que l’on reconnait le problème, estime, côté belge, Joëlle Delvaux, des Mutualités Chrétiennes. Toute mesure de sensibilisation est un pas dans la bonne direction. Mais nous ne sommes pas certains que cette mesure soit la solution au vrai problème. »
Parce que les personnes vraiment dépendantes pourront probablement continuer à se faire prescrire des opioïdes par différents médecins, qu’il y aura toujours de la falsification des prescriptions, et qu’il reste à prouver que le tramadol sera utilisé sur une période moins longue. « Un suivi des délivrances et prescriptions par le dossier pharmaceutique partagé nous semblerait une mesure plus efficace ».