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Le coin des chiens

Jusqu’au XXe siècle, l’Église a régné sur nos cimetières, reléguant les laïques et autres « pécheurs » dans des parcelles distinctes. Aujourd’hui, ce patrimoine funéraire laïque est souvent laissé à l’abandon et finit par disparaître. Mais ce n’est pas une fatalité. Le magazine flamand Knack a enquêté sur les « coins des chiens » de nos cimetières, la stèle d’une vieille figure du journalisme et le sort des columbariums décrépis.

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Le cimetère de Bassevelde

L’Église catholique a eu pendant des siècles le monopole de l’inhumation en Belgique. D’abord dans l’enceinte des églises, puis, à partir de la fin du XVIIIe siècle, dans des cimetières établis hors du centre. Le prêtre bénissait le terrain, à l’exception d’une petite parcelle, souvent séparée par une haie ou un mur. C’était là qu’étaient enterrés les pécheurs de tous poils : les laïques assumés, les criminels, les suicidés, et même les enfants morts non baptisés. Il en allait ainsi dans de nombreuses paroisses. Les pécheurs recevaient une tombe nue, anonyme, à l’extrémité du cimetière, bien souvent au nord ou au nord-ouest : dans les coins spongieux car moins ensoleillés.

Symboliquement, cet emplacement sombre et reculé était lourd de signification, et fut bientôt surnommé le coin des damnés, des gueux ou des chiens, c’est-à-dire l’endroit où les pécheurs étaient enterrés comme des chiens. À la fin du XIXe siècle, quand libéraux et catholiques livraient une lutte de pouvoir politique acharnée en Belgique, ces « coins des chiens » constituaient un thème important dans les campagnes électorales. La plupart des libéraux défendaient l’égalité de tous jusqu’après la mort et plaidaient donc pour l’abolition de cette pratique. Certains notables libéraux, voulant poser un geste fort, prirent même le contre­pied et se firent enterrer le plus loin possible à l’écart des autres sépultures. Les parcelles non bénies disparurent finalement au tournant …

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