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Sur la piste du Bison

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Quentin Duckit. Tous droits réservés.

Les rois du béton ont enfourché une monture bizarre. De grandes firmes belges ont misé sur le « Gruppo Bison » pour arracher les derniers beaux marchés de la construction : le grand hôpital de Liège ou la Rive Gauche de Charleroi, qui se dressent en ce moment. La manœuvre ? Du dumping social intensif à la sauce italienne, via l’embauche de travailleurs indiens, égyptiens ou kosovars exportés à très bas coût. Tout le secteur de la construction paraît contaminé par le virus du low cost, la grande faucheuse d’emplois… Enquête sur chantiers, les pieds dans la gadoue.

Un jeudi de routine à Charleroi, sous les frimas d’un printemps qui ressemble à l’automne. Quelques ouvriers basanés se sont donné rendez-vous au pied d’une grue. Sur le boulevard Tirou, où se dessinent les fondations du grand projet immobilier « Rive Gauche ». Une ville dans la ville. Dès 2017, c’est la promesse d’un shopping au chaud dans « le » nouveau temple du commerce, censé compenser la fuite des marques vers la périphérie. Au petit matin, les sept hommes au visage fermé n’ont aucune envie de se téléporter dans le temps. Ils sont venus d’Égypte pour trimer, via l’Italie. Pas pour rêver aux beaux magasins. Pour ça, il leur faudrait des papiers en ordre, un vrai contrat, la perspective d’enchaîner les jobs. Or, là, ils constatent qu’ils ont bossé gratos. Leurs poches sont vides.

Dès lors, ils pètent un câble et bouscu­lent les plans. La veille, l’un d’eux a téléphoné au délégué syndical Abdel Abid. Un métallo tunisien qui a fondé une famille en Belgique, il y a quinze ans. « Alnnajda ! » Au secours… Les mecs semblent à bout. Ils crient qu’ils vont escalader une grue pour exprimer leur désespoir. Ils ont été enrôlés par un entrepreneur italien au nom bizarre (Bison) qui leur a promis la lune sur des chantiers belges. Fichue embrouille. Les Égyptiens ne sont plus payés depuis six mois et ils logent dans des conditions miteuses.

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