Quelques « petits » problèmes dans la plantation
Socfin, palme d’or. Partie 2.
Enquête (CC BY-NC-ND) : Quentin Noirfalisse
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En 2011, Socfin a lancé une plantation dans la chefferie de Malen, au sud-est de la Sierra Leone. Depuis huit ans, un grave conflit foncier sévit entre de nombreux habitants et la société. Sous les palmiers à huile, les conditions de travail sont fustigées, et le processus de location des terres et les promesses qui l’accompagnaient, lourdement remis en question.
Acte 1.
Le poids des tâches
Voici Foday. Il est maigre et son regard donne l’impression de sonder le fond de votre âme. Il a enfoui son corps dans une salopette de travail verte, mais, bientôt, il ira l’enlever, et se reposera, en pensant sans doute à ses illusions perdues. Son visage est taché d’une poussière ocre, soulevée par le camion de la Socfin Agricultural Company (SAC), qui l’a laissé, avec quelques autres travailleurs, au village de Basaleh, chefferie de Malen, district de Pujehun, dans la province du sud de la Sierra Leone. Foday s’est levé vers 4 heures du matin. Il a entamé sa marche vers le quartier général de la SAC, filiale du géant de l’agrobusiness Socfin. Sept kilomètres et demi à fouler la terre battue, entouré d’infinies rangées de palmiers à huile ayant conquis le sol, à perte de vue. Au moindre retard, il risque d’être renvoyé chez lui, sans un leone en poche.
À 6 heures, un supérieur a distribué les tâches. Les cohortes de travailleurs ont filé aux quatre coins des 18 500 hectares de la concession, pour épandre des pesticides, slasher (couper) les plantes autour des palmiers qui pourraient concurrencer leur croissance, récolter les régimes de noix de palme et les ramener au bord des routes. À Malen, la population a plus que doublé entre 2004 et 2015. Près de 50 000 personnes y vivent, de nombreuses attirées d’ailleurs par l’emploi dans la plantation.