Le chaman qui avait pris le mauvais train
Un poète à la SNCB

Il avait l’âme d’un poète mais un contrat d’employé à la SNCB. Durant des années, Jan Ducheyne s’est adonné à l’humour de chemin de fer. Il a finalement choisi la voie de l’art.
Il est des soirs d’été meilleurs que d’autres. Comme celui du 28 juillet dernier à Ostende, grâce à un soleil couchant de gala, à la bonne compagnie et au formidable orchestre Noodzakelijk Kwaad qui jouait sur la digue. Trois musiciens emmenés par un poète. « Peu de choses restent constamment belles », a déclamé Jan Ducheyne en pointant vers le lointain. « Mais il subsiste l’évidence d’un coucher de soleil sur une plage d’enfance. »
Avec son long rouleau de papier, il avait des airs de chaman. Et pourtant, il était autrefois accompagnateur de train. Le plus singulier que la SNCB ait jamais compté dans ses rangs. En ce temps-là, déjà, il débitait des poèmes à la chaîne dans les installations sonores de la compagnie ferroviaire, pour le plus grand bonheur des voyageurs.
Cela fait longtemps, maintenant. Aujourd’hui, par une journée hivernale de novembre, nous nous trouvons dans son salon, à Bruxelles. Sans coucher de soleil à admirer, cette fois, mais la musique, elle, ne se tait jamais. Entre nous deux, l’album « Morsen met Mensen », le dernier et superbe opus de Noodzakelijk Kwaad : on croirait ressuscités les poètes de la Beat gene­ration, qui s’expriment désormais en néerlandais. Ducheyne et ses acolytes y parlent du vent, des fleurs sauvages, de faire découvrir des rues, de danser un peu et des fêtes post-Covid. Et d’une cabine de plage.
Ce dernier thème n’est pas le fruit du …