Baudouin, les pigeons et la lessiveuse
Sociologie des petites annonces
Texte (CC BY-NC-ND) : Chloé Andries
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Publier des « petites annonces », c’est aussi documenter le quotidien d’une époque. Garder des traces des échanges banals, des rêves, des intimités. On a scruté quelques journaux de l’année 1950. En voici la photo.
1950. Grande et petite histoire
Mai – La catastrophe de Trazegnies tue 39 personnes dans un charbonnage, à la suite d’un coup de grisou.
Août – Baudouin accède au trône de Belgique, après l’abdication de son père Léopold III.
Décembre – 600 soldats belges embarquent pour la guerre de Corée.
Voilà pour la grande Histoire, qui a fait la une des journaux. Mais, dans ces mêmes journaux, en 1950, chaque jour, des dizaines de petites annonces ont raconté, à bas bruit, une autre histoire.
Dans celle-ci, on s’est échangé des bons plans entre colombophiles, les hommes avaient déjà des problèmes de prostate, les lampes de bronzage se développaient, les détectives pullulaient, certains engageaient des servantes, y compris Monsieur le curé, pendant que des orphelines ou de bons partis cherchaient leur moitié.
C’est une « histoire infra-ordinaire », faite de « petits trous de serrure », d’« événements de faible intensité […] toutes ces inscriptions d’une époque qui tombent dans l’oubli et sans lesquelles, pourtant, rien n’est intelligible », écrit Philippe Artières, qui a cherché les miettes d’une histoire de France dans les petites annonces du quotidien Libération de 1980 (Miettes). Pour Hannah Frydman, historienne à l’Université de Washington (Seattle) et co-autrice d’Écrire l’histoire des petites annonces, « c’est assez étonnant de voir à quel point elles occupent une place importante dans la presse et que, pourtant, leur histoire n’a jamais été écrite ».
1950. C’est une période fascinante, de bouillonnement, d’espoir, d’accélération. On sort de la guerre, les innovations s’accumulent, le confort …