Made in China
En trois décennies, près de 140 000 enfants chinois ont été adoptés dans le monde. Un phénomène qui coïncide avec la mise en place de la politique de l’enfant unique en Chine (1979-2015). Parmi ces bambins, la photographe Youqine Lefèvre, qui est retournée dans son pays natal en quête de ses origines.
Place Tiananmen, août 1994. Au pied du monument des Héros du peuple, une poignée de curieux se masse autour de quelques touristes occidentaux. Sur la photo aux couleurs fanées, on entrevoit une poussette et le regard complice des nouveaux parents.
Neuf jours plus tôt, six familles belges qui ne se connaissent pratiquement pas ont débarqué dans la capitale chinoise. Le père de Youqine est du voyage. Comme des milliers de parents en quête d’adoption, il a suivi l’itinéraire tracé par les autorités de Pékin, qui viennent de légaliser l’adoption (1992). Le futur papa est conduit dans un orphelinat de la province du Hunan, à 1 600 km de Pékin. Après quelques formalités, on lui tend une fillette : Yue Qing, dont il simplifiera le nom en Youqine.
De retour à la capitale, le voyage se termine de manière rituelle par une visite touristique de la Cité interdite. « On a toutes les mêmes photos de ces voyages mi-touristiques, mi-adoptions, ironise Youqine, devenue photographe. Quand on y repense aujourd’hui, on ne peut que s’étonner du caractère systématique de ces adoptions. »
Au cours de cette seule année 1994, 1 479 enfants chinois seront adoptés internationalement, principalement par des familles américaines et canadiennes. Dix-neuf atterriront en Belgique. Entre 1993 et 2014, 1 137 enfants chinois arriveront en Fédération Wallonie-Bruxelles.
Retour à Yueyang
Youqine grandit à Namur, entourée des siens et sans chercher à connaître ses origines : « Ma relation avec mon pays d’origine a été conflictuelle pendant très longtemps. »
En 2017, alors âgée de 23 ans, elle effectue …