Bisque, bisque, rage

On a tellement ri de Theux, « capitale wallonne de l’écrevisse », que la commune liégeoise a fini par renier le crustacé. Inquiet, Médor replonge les mains dans le panier de crabes.
Pendant cinq ans, entre 2001 et 2006, Theux a parrainé des écrevisses. La ville, peu sensible aux moqueries, s’était autoproclamée « capitale wallonne » de l’animal, à l’initiative de l’échevin socialiste Albert Kever. Celui-ci voulait soutenir un projet de conservation tout en offrant aux gourmets theutois (et aux touristes hollandais) un produit de choix. Didier Herman, biologiste qui a piloté le projet scientifique, en est convaincu : contrairement aux pandas de Pairi Daiza ou aux ours polaires, « les gens s’intéresseront au sort des écrevisses par l’approche culinaire ».
Lors du changement de majorité en 2006, les libéraux, affamés, ont abandonné le projet et démonté la statue d’écrevisse géante qui trônait à l’entrée de la ville. « Ils voulaient des résultats immédiats », explique Didier Herman. « Mais cela prend du temps. » Deux fois, les bassins de culture ont été frappés par la maladie et toutes les écrevisses sont mortes. Depuis, la ville concentre ses efforts touristiques sur les 600 Franchimontois, morts de façon plus héroïque. Mais alors, qui se soucie encore de ces pauvres bêtes ?
Didier Herman, justement. Étudiant, ce zoologiste pensait consacrer sa carrière aux grands mammifères marins. Faute d’océan dans la vallée de l’Amblève, il a revu ses ambitions. Après avoir donné un temps dans l’abeille, il a créé l’Association pour la sauvegarde et la promotion des écrevisses indigènes (ASPEI). Il nous reçoit dans un sous-sol de Creppe (Spa), où est installé son centre de documentation. Ça sent un peu la crevette et le manque …