Fraudez comme vous voulez !
Enquête (CC BY-NC-ND) : Philippe Engels
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Exemples à l’appui, voici comment la Belgique cafouille dans sa lutte anti-dumping. Seuls les marchands de travail au rabais risquent des sanctions. Les grosses sociétés, les bénéficiaires de la fraude passent sous les radars. L’ONSS perd des centaines de millions d’euros sans réagir. Et au ministère de la Mobilité, on élude même les cotisations sociales.
Virginie Dufrasne ne s’attendait pas à être cuisinée de la sorte par la police judiciaire au printemps 2016. Puis à disparaître aussi vite des radars. Présentée par le quotidien économique L’Écho comme « une star du patronat wallon », cette trentenaire, « préférant les hauts talons aux bottines, » est la précoce administratrice déléguée d’un géant de la construction, Lixon à Charleroi. Fondé en 1895. 66 millions d’euros de chiffre d’affaires et 206 travailleurs déclarés dans les derniers comptes annuels disponibles, ceux de 2017.
Face aux flics carolos, la star venue sans avocat est restée calme malgré la déferlante de questions piquantes. « Sur vos chantiers, les sous-traitants sont-ils tous agréés ? », « Comment justifiez-vous que les bons de commande des travaux soient parfois datés après ceux-ci ? » Et ainsi de suite. Dans le viseur du fisc et des contrôleurs sociaux : une filière bien huilée de travail
au noir. Pour gagner des contrats publics comme privés, Lixon, Duchêne, Galère et compagnie auraient sous-traité le plafonnage d’hôpitaux, de crèches ou d’immeubles résidentiels à de petites sociétés qui en mobilisaient d’autres, et d’autres encore. Principal intérêt ? Comprimer les coûts, bien entendu. Serrer les prix en poussant le sous-traitant suivant à bosser pour une chique. Quitte à franchir la ligne rouge du droit social. Dès 2014, l’Inspection spéciale des impôts avait flairé l’anomalie, puis l’Office national de sécurité sociale (ONSS) s’était mis sur le coup. En recourant à de la main-d’œuvre belge ou étrangère, non déclarée, les différents …