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Huuuue, Bienvenue dans l’infolettre « Flûte, j’ai poney », une enquête participative du magazine Médor. Jusqu’en décembre 2024, nous nous intéressons à la pression qui pèse sur les parents par rapport aux activités extrascolaires (temps, budgets, trajets, charge mentale et messages sur les groupes whatsapp). Vous avez loupé des bouts ? Rendez-vous sur www.medor.coop/poney La conclusion de ce travail sera publiée dans le Médor n°37 (décembre 2024). Abonnez-vous avant ! www.medor.coop/abo
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Ces joyeuses illustrations sont signées Pauline Lecerf.
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Nous revoilà ! Pas au grand galop, c’est vrai. Il a fallu gérer le bouclage de Médor n°36, la fin des vacances et le retour à notre vie sous chrono, les sandales de gym, la liste d’attente à l’académie et, déjà (oui, déjà !), les premiers échanges sur les groupes WhatsApp de parents (« Les mamas, avez-vous acheté l’uniforme baladins ? »).Dans cette rentrée surchargée, on s’est posé une question : Ce ne serait pas plus simple s’ils faisaient de la flûte, du judo ou du théâtre directement à l’école ? De cette question cruciale, on a fait tout un programme :
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Lundi, activité « excursion à l’université de Gand »
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Nous avons rencontré Michel Vandenbroeck, spécialiste de pédagogie sociale et auteur du génial essai « Être parent dans notre monde néolibéral ». Il était moins une : dans un mois, il part à la retraite. Pour lui, c’est clair, il est temps de repenser complètement l’organisation de la journée des enfants et la place de l’école dans nos vies. « Le modèle sur lequel le système scolaire s’est construit, c’est celui de la société des années 1950 et des régions rurales, où papa travaille et maman reste à la maison. » Dans cette configuration, madame va conduire les gamins le matin, juste avant le début des cours, vient les rechercher à midi pour les faire manger à la maison, les ramène à l’école, et re-re-vient les chercher à 15h30 (puis, on arrête l’école les mois d’été pour rentrer les blés). L’école n’est dès lors pas responsable de l’enfant sur le temps de midi, ni avant ou après la classe. Aujourd’hui, « c’est absurde », estime notre professeur ! Absurde parce que la société a changé mais que l’école, elle… ne s’est pas adaptée. « Un enfant a deux fois et demie plus de vacances que ses parents ». Comment fait-on ? La société n’a pas pris en charge cette question délicate. Pire, selon lui, les pouvoirs publics n’ont pas pris cette responsabilité, qui a été « individualisée » et transférée sur les parents ! À eux, donc, de résoudre une équation sociétale dont ils n’ont pas la solution, à coups de mi-temps, d’appels aux grands-parents, de garderies pas top-top ou d’activités trop chères. Pour Michel Vandenbroucke, il faut repenser la journée des enfants, de manière globale, de 8h à 18h. Et réinventer l’école. Qui deviendrait un vrai lieu de vie, en lien avec les acteurs de l’extrascolaire du quartier. Une réforme de l’accueil temps-libre est inscrite dans la nouvelle déclaration de politique communautaire (MR-Engagés) mais cela fait déjà deux législatures que la Fédération Wallonie-Bruxelles se casse les dents sur ce sujet hyper-brûlant. On y reviendra dans le détail dans une prochaine newsletter. En attendant, sur le terrain, on bricole des solutions…
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Mardi, activité « bricolage à l’école »
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Des parents d’élèves d’une école bruxelloise nous ont raconté comment ils avaient voulu « dynamiser » l’offre extrascolaire de leur école. L’établissement a accepté le principe ; les parents (en fait, surtout les mères) se sont attelés à la recherche d’activités à proposer. Et bien, ce ne fut pas simple. Faire du théâtre, des échecs ou du macramé, pourquoi pas. Mais le Pouvoir organisateur de l’école (ici, la commune) a fixé un tarif maximal de 3 euros par enfant par atelier (relevé à 5 euros pour cette rentrée), pour éviter de créer un fossé entre ceux qui peuvent payer… et les autres. Sybille est partie à la chasse aux prestataires. « On cherchait partout, et on n’arrivait jamais à ce tarif. » Tant pis pour la biodanza (mi-danse, mi-expression corporelle), qui coûtait 7,5 euros. Parents et école ont tenté de bricoler, « par exemple, on a mis 12 élèves au lieu de 10, pour rester sous le plafond des 5 euros. » Au-delà du prix, la direction de l’école a exprimé une autre crainte, liée à l’accessibilité : « Les offres parascolaires deviennent parfois un argument de vente d’une école. Ça pourrait devenir un jeu dangereux », explique le directeur. - Deuxième frein : l’organisation
D’ailleurs, pour ce directeur, le programme des activités est « le » nouveau casse-tête de la rentrée (un de plus !). Il faut réorganiser les plannings des équipes de nettoyage, parlementer avec les profs qui voudraient laisser leur matériel en classe sans tout devoir réinstaller le lendemain… Ou encore veiller à ne pas perdre les précieux subsides octroyés aux équipes de garderie, calculés sur le nombre d’enfants présents à 15h45 et dont l’école a absolument besoin. Tout cela sans compter la logistique inscriptions : « C’est quasiment du 3, 2, 1 GO ! Il faut mettre un courrier dans le cartable de tous les enfants le même jour pour que les parents puissent s’inscrire en même temps. Or, certains sont à la garderie après l’école. J’ai envoyé un message aux parents pour dire qu’à 15h15 j’allais envoyer un mail pour les inscriptions. Lundi, je sais que j’aurai une file dans mon bureau pour ceux qui n’auront pas eu de place. » Bien sûr, de bonnes âmes lui ont donné des conseils. « On m’a dit de faire les inscriptions par trimestre et non pour l’année. Mais je ne peux pas consacrer 3 jours par trimestre à ça. Ou qu’il faudrait limiter à une activité par enfant. Mais en travaillant avec des ASBL extérieures, c’est difficile de centraliser. » Bref. Aujourd’hui, avec la meilleure volonté du monde, on bricole. L’établissement de 520 élèves compte 100 places par jour pour l’étude et 150 à 200 places pour les activités parascolaires (il y a aussi des ateliers organisés par l’Académie de musique directement à l’école, gratuits et financés par la FWB). Premier arrivé, premier servi. Bon amusement !
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Mercredi, activité « j’exprime ma gratitude à l’univers »
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Merci aux parents qui ont témoigné et expliqué à quel point c’est trop cool que leurs enfants puissent faire des activités directement à l’école. Elise, maman solo, une fille : « La danse, c’est sa grande passion. Pas l’opéra de Paris mais le plaisir du rythme et d’être avec ses copines après l’école (c’est sur place, et ça, ça aide vachement !!) » Parce que pour le reste (la natation, l’anglais), avec le boulot, la garde alternée, « ça demande une organisation de dingue ! ». « Prendre son enfant à l’école à 15h30 quand on a un full time et le déposer 30 minutes plus tard à une activité en repassant d’abord par la maison pour faire une pause pipi (plus confo qu’à l’école), c’est chaud. La circulation, c’est chaud. Et attendre dans la voiture, c’est chaud. Ou à l’inverse très très froid en hiver. »
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« Les parents mettent leur alarme le jour J heure H et sautent sur les inscriptions aux activités organisées au sein de l’école (hyper pratique) par une ASBL indépendante. Il y a des cours tous les jours, pendant le temps de midi et après 15h20. Piano ? 470 euros. Capoeira ? 185 euros. Si c’est trop cher, ou que tu n’as pas la place ? Tu mets ton enfant à la garderie. Mes filles me disent : "Maman, on est toutes seules à la garderie pendant que nos copines font des chouettes activités". Il y en a qui font des activités tous les jours. C’est impossible pour nous de financer ça. »
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Vendredi, activité « recherche de l’activité la plus cool du moment »
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On a trouvé ! La tendance, c’est d’inscrire ses enfants à un stage de langue des signes alors qu’ils sont super-bien-entendants. En plus de les ouvrir à la différence, de favoriser l’inclusion, il paraît que ça stimule l’imaginaire. Top, non ? Christophe nous a justement écrit : « On propose du bébé-signes aux enfants entendants, mais des profs signants pour les enfants sourds ? Il y en a très peu. » Lui nous raconte les stages et ateliers inadaptés aux enfants sourds et malentendants, l’absence d’animateurs qui signent. « C’est lourd au quotidien de n’avoir accès à rien, de devoir dire à son enfant que oui peut-être il peut aller à l’activité, mais, pour communiquer avec les autres enfants qui ne signent pas, ça va être difficile. Moi-même je suis sourd, mes collègues sont sourds, ont des enfants sourds, et on discute de tous ces sujets.» Si, comme Christophe, vous voulez nous « écrire des pavés », nous encourager, nous liker, nous jeter des tomates ou des gif, écrivez-nous à poney@medor.coop Pour simplement répondre à notre questionnaire : c’est ici. À intervalle surprise, dans cette infolettre, on vous partagera tout un tas d’infos. Transférez-la autour de vous. Ou dites à vos potes parents de s’y abonner, sur www.medor.coop/poney.
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Chloé Andries Chaque jour, elle remercie le ciel que la passion de sa fille soit de « chiller dans le canapé ». Ce qui lui laisse du temps pour sa propre passion, fabriquer des pièges à limaces. Le reste de ses journées, Chloé les passe comme journaliste et pilote de Médor. Elle a réalisé pour la presse belge et française des enquêtes (et un film) sur les écoles alternatives, les réseaux catholiques d’extrême droite ou les garagistes du fin fond du Hainaut. Ses dadas : l’éducation, les religions, l’identité et les marges. Céline Gautier Experte du hobby horse (à titre professionnel) et joueuse de badminton sur le temps de midi, Céline connaît les meilleurs plans de stages pour enfants mais adore surtout fabriquer des décors en carton avec sa fille. Sinon, est elle aussi journaliste et pilote de Médor. Elle a réalisé, entre autres, des enquêtes sur le don d’ovocytes (prix Belfius 2017), l’enseignement spécialisé ou les places en crèche. Elle s’intéresse aux questions de société, à l’enseignement ou à l’accord du participe passé.
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Merci de votre intérêt pour notre enquête ! On se retrouve bientôt pour la même chose ou presque.
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